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Les forêts tropicales africaines n’ont pas récupéré après l’épisode extrême El Niño de 2015-2016


Des chercheurs d’INRAE, du CEA et du CNRS, grâce à un outil qu’ils ont récemment mis au point[1], ont quantifié l’évolution des stocks de carbone dans la biomasse végétale aérienne des tropiques (Amérique, Afrique, Asie) au cours de la période 2010-2017[2]. Les résultats, publiés dans la revue Science Advances le 3 février 2020, montrent que les forêts tropicales, en particulier celles d’Afrique, n’ont pas récupéré après l’épisode El Niño de 2015-2016. La sécheresse marquée associée à cet épisode, succédant à une période de sécheresse en 2014, a conduit à une aggravation du déficit en eau dans la zone racinaire, et par conséquent à d’importantes pertes de carbone.​

Publié le 6 février 2020

​La sécheresse sévère et les températures extrêmes engendrées lors de l’évènement El Niño de 2015-2016 ont conduit à d’importantes émissions de CO2 dans l’atmosphère par la végétation, et donc une baisse des stocks de carbone dans la biomasse végétale. Avec le retour de conditions plus humides et des températures en moyenne plus basses au niveau des tropiques à partir de mi-2016, une production accrue de biomasse était attendue, avec un possible retour aux quantités de carbone de 2014.

Mais qu’en est-il en réalité ? Les chercheurs d’INRAE, du CEA et du CNRS ont utilisé leur nouveau jeu de données issu de l’indice de végétation, appelé L-VOD (L-band vegetation optical depth) et obtenu à partir des observations spatiales du satellite SMOS, pour évaluer l’évolution du stock de carbone dans la biomasse aérienne de la végétation tropicale sur la période 2010-2017.

Les résultats obtenus montrent que les pertes de carbone en Afrique représentent 56 % des pertes observées à l’échelle des tropiques (1,6 PgC[3]) pendant l’épisode El Niño (2015-2016).

Après l’épisode El Niño de 2015-2016, les forêts africaines n’ont pas récupéré en 2017

Les chercheurs ont également observé que les stocks de carbone dans la biomasse aérienne de la végétation des tropiques ont fortement diminué au cours de la période 2014-2017 (-1,3 PgC). L’Afrique représente environ 70% de la perte nette globale (-0,9 PgC), suivie de l’Amérique (-0,5 PgC).

Fin 2017, malgré un retour à des conditions climatiques normales, les stocks n’étaient pas revenus au niveau de ceux de 2014 à l’échelle des tropiques, avec des disparités locales : ils continuaient à diminuer en Afrique, se rapprochaient lentement du niveau de 2014 en Asie et en Amérique, et avaient retrouvé leur niveau de 2014 dans les zones tropicales arides.

Que les zones soient ou non déforestées en Asie et en Amérique, la dynamique est similaire. En revanche, la perte de carbone est supérieure dans les zones non déforestées. Ces pertes en Afrique pourraient s’expliquer par la diminution de la réserve en eau des sols, liée aux effets cumulés de faibles précipitations et d’une évapotranspiration accrue, en particulier dans le nord de l’Afrique tropicale.

Ces résultats montrent que les sécheresses et El Niño - phénomènes qui risquent de s’intensifier - ont des répercussions à long terme sur la vulnérabilité des stocks de carbone dans les régions tropicales. Leurs successions pourraient avoir des effets cumulatifs dramatiques sur l’assèchement de la zone racinaire et, par répercussion, sur les pertes de carbone dans la biomasse aérienne de la végétation.

evolution stocks de carbone.jpg

Evolution des stocks de carbone dans la biomasse aérienne de la végétation, estimée à partir de l'index L-VOD dans les régions tropicales sur la période 2014-2017.
On remarque que globalement, ce stock en 2017 n’a pas retrouvé son niveau de 2014, avant El Niño.
On note que si les forêts tropicales de la zone Asie ont récupéré, les forêts tropicales africaines ne récupèrent pas, et plus encore, elles continuent de voir leur stock diminuer au cours de 2017.
© Inra / L. Fan


[1] Un nouvel outil pour suivre le bilan carbone de la végétation : première application au continent africain

[2] La biomasse aérienne de la végétation de la zone tropicale n’a plus d’impact positif sur le stockage du carbone

[3] L’unité utilisée ici est le petagramme (Pg).-1 PgC correspond à une perte de 1 petagramme de carbone soit 1 milliard de tonnes de carbone.

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