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L'impact de la tectonique sur le climat

Publié le 14 mars 2022

Connaître l’évolution passée du climat est fondamental pour comprendre le fonctionnement de ce système complexe et les interactions entre ses différents composants : atmosphère, océan, glaces et continents, végétation. Plusieurs facteurs influencent, à différentes échelles de temps, le climat de la Terre. À l’échelle des temps géologiques, la tectonique des plaques a modelé, sur des dizaines de millions d’années,  différents visages de la Terre. Du supercontinent La Pangée, il y a environ 300 millions d’années, à aujourd’hui, le mouvement des plaques terrestres a modifié le climat de notre planète. L’essentiel sur… les différents visages et climats de la Terre.

​Quels facteurs influencent le climat de la Terre au cours de son histoire ?

Plusieurs facteurs influencent, à différentes échelles de temps, le climat de la Terre :

  • À l’échelle du milliard d’années : l’évolution de l’intensité solaire et de la composition atmosphérique.
  • À l’échelle de la dizaine de millions d’années : la tectonique des plaques.
  • À l’échelle de la dizaine à la centaine de milliers d’années : l’évolution de l’orbite terrestre.
  • À l’échelle de la centaine d’années et depuis les révolutions industrielles, l’Homme s’est hissé au rang de facteur majeur du changement climatique en modifiant la composition de l’atmosphère terrestre

Facteurs influençant le climat de la Terre au cours de son histoire
Facteurs influençant le climat de la Terre au cours de son histoire. © CEA/O. Joubé


L’impact de la tectonique des plaques sur le climat

À l’échelle des temps géologiques, la surface de la Terre est en permanente évolution : les plaques tectoniques qui constituent sa surface bougent les unes par rapport aux autres, en moyenne de quelques centimètres par an.


VidéoLa dérive des continents depuis 250 millions d'années
Crédits : Jean Besse - Institut de Physique du Globe de Paris


Ce mouvement des continents, décrit pour la première fois par Alfred Wegener, impacte le visage de la Terre et son climat.

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Tectonique des plaques : formation des montagnes © CEA/Yuvanoé


Les mouvements tectoniques horizontaux (dérive des plaques, ouverture ou fermeture des bassins océaniques, disparition ou apparition des mers et océans) et verticaux (création de chaînes de montagnes par exemple) modifient les dynamiques océaniques et atmosphériques qui transportent le surplus de chaleur reçue dans les tropiques vers les hautes latitudes plus froides.

Notions clés

  • À l’échelle de la dizaine de millions d’années, le mouvement des continents, décrit pour la première fois par Alfred Wegener, impacte le visage de la Terre et son climat.
  • La concentration actuelle de CO2 atmosphérique (principal gaz à effet de serre) est de 410 ppmv (à comparer avec la valeur avant l’industrialisation de 280 ppmv). Pour retrouver une telle valeur il faut retourner près de 3 millions d’années en arrière, au Pliocène, où le climat était plus chaud et le niveau marin plus haut d’environ 15 mètres.

Cette modification des dynamiques océaniques et atmosphériques transforme directement le climat. Un autre élément fondamental pour comprendre l’interaction climat-tectonique est la modification indirecte de la teneur en dioxyde de carbone de l’atmosphère. Or, le CO2 est un gaz à effet de serre qui peut piloter et faire varier la température à la surface du globe. Zoom sur les différents visages et climats de la Terre sur 350 millions d’années.

VidéoLe cycle du carbone

De 350 à 300 millions d’années : Des climats chauds et humides à la glaciation du permo-carbonifère

À la fin du Dévonien, il y a environ 350 millions d’années, et pendant l’ère Carbonifère (jusqu’à environ 300 millions d’années), le climat est à la fois très chaud et très humide sur Terre. Les continents s’étirent de l’équateur au pôle Sud et dérivent vers le sud. L’apparition de la biosphère continentale crée un nouveau stock de carbone dans les sols alors que la vie ne s’était développée quasiment que dans les océans jusqu’au Dévonien. Ce nouveau réservoir de carbone a pour effet de baisser la teneur en CO2 dans l’atmosphère et donc va produire un refroidissement à long terme du climat. C’est au Carbonifère qu’un climat très humide va produire l’ensevelissement de la végétation, biomasse qui sera transformée en charbon par enfouissement. La quantité de gaz à effet de serre diminuant, la température s’affaiblit progressivement, ce qui va conduire à une glaciation dans l’hémisphère sud il y a 320 millions d’années. Cette glaciation dure une cinquantaine de millions d’années et marque le début de Permien.

De 300 à 250 millions d’années : Le Permien, variation du climat sur un supercontinent

À cette période, les continents s’agrègent autour du pôle Sud pour former un supercontinent : La Pangée. Cette agrégation est à l’origine de climats contrastés : climat continental aux hautes latitudes, zone aride dans les subtropiques. Vers 250 millions d’années, une extinction de 90 % de la faune et de la flore se produit dans un climat chaud et aride.


De 250 à 65 millions d’années : dislocation de la Pangée

Il y a environ 250 millions d’années, La Pangée commence à se fracturer, cette fragmentation s’accélère autour de 200 millions d’années. Cette dislocation va former deux nouveaux supercontinents : le Gondwana et la Laurasia, par des systèmes de rifts séparant l'Amérique du Nord et l'Afrique.

Cette dérive des continents est responsable d’un refroidissement progressif du climat. En effet, la quantité de pluie et l’érosion des roches continentales augmentent, ce qui a pour conséquence de réduire le taux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Pendant cette dislocation, il y a d’importantes variations climatiques, mais globalement le climat est chaud sans période glaciaire importante et avec une tendance sur le long terme à la baisse du CO2 atmosphérique.

Bien que l’Antarctique soit en position polaire depuis près de 90 millions d’années, la calotte de glace ne s’installe qu’il y a 34 millions d’années lorsque le CO2 a suffisamment baissé pour que la neige tombée l’hiver ne soit plus fondue pendant l’été. D’ailleurs, les dinosaures (250-65 millions d’années) ont connu, pendant ces périodes géologiques (Trias, Jurassique et Crétacé) des climats chauds sans épisodes glaciaires marqués.


De 50 à 7 millions d’années : en route vers la glaciation et vers un climat plus froid

Il y a 50 millions d’années, un événement tectonique majeur se produit : la collision Inde-Asie. La plaque indienne se sépare de Madagascar et tape dans le continent asiatique, créant la chaîne de l’Himalaya et le plateau tibétain. Après cette période, les moussons augmentent. Une lente décroissance du CO2 atmosphérique se produit associée à un refroidissement du climat.

Il y a 34 millions d’années, un événement de glaciation majeur se produit, la calotte antarctique s’établit. Cette nouvelle surface blanche change l’albédo (part d’énergie solaire réfléchie par rapport à celle reçue) de cette région. L’énergie solaire est davantage réfléchie, ce qui refroidit encore plus les températures dans cette partie du globe. Le climat de la Terre devient alors particulièrement froid. Depuis l’Éocène, il y a environ 50 millions d’années, le taux de CO2 atmosphérique a été divisé par 4  (passant de plus de 1 000 parties par million en volume (ppmv) à 300 ppmv au début du Quaternaire) et la température moyenne globale de notre planète a baissé d’environ 6°C.

Un autre événement tectonique majeur de ces 50 derniers millions d’années est la disparition d’une gigantesque mer épicontinentale, qui couvrait tout l’Est de l’Europe et l’Ouest de l’Asie : la Paratéthys. Ce retrait va générer une amplification des grandes moussons d’Asie et une aridification de l’Afrique du Nord, climat que connaîtront les premiers ancêtres des hommes, il y a 7 millions d’années.


De 7 millions d’années à aujourd’hui : l’influence de l’Homme sur le climat

Un événement tectonique important au cours de ces 7 derniers millions d’années a été la phase finale de la surrection du rift africain qui va avoir pour effet d’arridifier la partie Est africaine. La Savane va s’étendre au détriment des forêts ce qui va aussi avoir un impact environnemental fort sur l’évolution de nos ancêtres. Il y a 3 millions d’années, l’hémisphère nord s’englace à son tour avec la mise en place de la calotte du Groenland dans un contexte de concentration en CO2 très faible (environ 300 ppmv). Ce refroidissement de l’hémisphère nord va permettre la mise en place d’oscillations glaciaires/interglaciaires. Grâce aux forages antarctiques, nous sommes capables de reproduire l’évolution depuis 800 000 ans à la fois des variations de température via les mesures isotopiques, mais également le contenu atmosphérique en CO2 grâce aux bulles piégées dans ces glaces. Ces enregistrements permettent de bien documenter ces oscillations dont la fréquence est de 100 000 ans avec des phases glaciaires longues et froides et des interglaciaires courts et plus chauds comme celui dans lequel nous vivons. Ces oscillations changent aussi le visage de la Terre puisqu’en période glaciaire il y a deux calottes de glace supplémentaires sur le nord de l’Amérique et de l’Europe, ce qui correspond à une baisse du niveau marin de 120 m.

C’est notamment lors du dernier cycle glaciaire/interglaciaire que l’Homme va s’installer sur la plupart des continents. Depuis, l’Homme a évolué et a industrialisé la planète. En 200 ans, temps très court pour l’histoire de la Terre, l’Homme a rejeté de par ses activités humaines de nombreux gaz à effet de serre dans l’atmosphère. La concentration actuelle de CO2 (principal gaz à effet de serre) atmosphérique est de 410 ppmv (à comparer avec la valeur avant l’industrialisation de 280 ppmv). Pour retrouver une telle valeur, il faut retourner près de 3 millions d’années en arrière, au Pliocène, où le climat était plus chaud et le niveau marin plus haut d’environ 15 m. Une telle concentration en CO2 atmosphérique va entraîner inéluctablement, d’ici les prochaines décennies, la fonte partielle du Groenland et de l’Antarctique de l’Ouest. Cette fonte contribuera de plus en plus à la remontée du niveau marin. L’Homme a donc une influence fulgurante sur le climat incomparable avec le tempo lent de la tectonique des plaques.

VidéoQu'est-ce que l'effet d'albédo ?


Deux calottes aux deux pôles : un phénomène très rare dans l’histoire de la Terre

Notre Terre actuelle est constituée de deux calottes de glaces : l’une proche du pôle Nord et l’autre au pôle Sud. Ce phénomène est très rare dans l’histoire de la Terre, car pour réussir à maintenir deux régions glacées aux deux extrémités du globe, plusieurs conditions sont requises : un climat relativement froid associé à un taux de CO2 bas dans l’atmosphère pour permettre le maintien de la glace en été et la présence d’un continent à chaque pôle. La calotte de glace au pôle Sud date d’il y a 34 millions d’années. Celle du Groenland a été créée il y a 3 millions d’années.


Comment reconstituer les climats et géographies des continents passés ?

Pour pouvoir reconstruire les climats passés sur 250 millions d’années, les chercheurs explorent notamment les fonds océaniques et analysent le magnétisme des roches issues des dorsales océaniques. C’est ce qu’on appelle le paléomagnétisme.

En effet, le long des dorsales océaniques, on retrouve des bandes de roches fossilisées qui conservent l’intensité et la direction du champ magnétique de la Terre ainsi que ses inversions au fond de l’océan Atlantique. Le plancher océanique forme de grandes bandes symétriques et parallèles aux dorsales où l’orientation du champ magnétique alterne. En 1963, les deux géophysiciens Frederick Vine et Drummond Matthews expliquent cette alternance par la création continue d’une nouvelle croûte océanique qui mémorise le champ magnétique terrestre présent au moment de sa formation. Plus les roches sont éloignées de la dorsale, plus elles sont âgées. On peut ainsi dater les roches et reconstruire la géographie de la Terre sur près de 250 millions d’années.

Les chercheurs utilisent aussi ces données récoltées pour construire des modèles et simuler le climat sur les différentes régions de la planète, à différentes époques.

Les enjeux de la compréhension et modélisation des climats passés

Comprendre les mécaniques d’évolution climatique sur des temps géologiques permet de mettre en perspective les dérèglements actuels du climat et de disposer d’éléments de réflexion pour mieux anticiper le climat du futur. Cela permet d’expliquer et comprendre la variabilité climatique naturelle et celle induite par l’Homme et ses activités. Cette recherche sur les climats passés est appelée « Paléoclimatologie » et les résultats de ces recherches alimentent directement les rapports du GIEC.