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Un microARN prédictif de la récidive du carcinome corticosurrénalien


​L'étude menée par des chercheurs de l'Irig montre pour la première fois que le microARN miR-483-5p, dosé en post-opératoire dans les 3 mois post-chirurgie, est un biomarqueur puissant pour le pronostic du corticosurrénalome. Ce test permettrait de prendre en charge de façon non-invasive les patients porteurs de ce cancer et offre, pour l’avenir, la perspective d’une intégration des miR en routine clinique pour le diagnostic/pronostic de ce type de carcinome.

Publié le 9 septembre 2020
Les microARN (miR) sont de petits ARN non-codants qui régulent l’expression des gènes. Leur niveau d’expression est fortement altéré dans les cellules tumorales comparées aux cellules normales. De plus, les cellules sont capables d’une sécrétion complexe et finement régulée de miR dans le milieu extracellulaire, les mIR étant de ce fait retrouvés dans tous les fluides corporels. Depuis quelques années, les miR ont émergé comme des biomarqueurs puissants de diverses pathologies humaines, notamment lorsqu’ils sont mesurés dans la circulation sanguine. Chez les patients porteurs de cancer, la détection de taux anormaux de miR dans le sang en fait des outils de diagnostic très prometteurs en oncologie.

Les carcinomes de la corticosurrénale, ou corticosurrénalomes (CCS), sont des cancers rares de pronostic sombre dont le taux de survie à 5 ans est inférieur à 40 %. L’évaluation pronostique est un élément essentiel de la prise en charge de ces tumeurs. Les principaux facteurs pronostiques actuels sont l’extension de la tumeur et l’intensité du marqueur de prolifération cellulaire Ki67. Cependant, le pronostic reste hétérogène et difficile à prédire à l’échelle individuelle. La complexité et l’hétérogénéité des altérations moléculaires du CCS sont impliquées dans sa résistance aux thérapies anti-cancéreuses conventionnelles et aux thérapies ciblées. Le carcinome corticosurrénalien bénéficie d’une thérapeutique limitée et le meilleur traitement de cette tumeur maligne reste l’exérèse chirurgicale. Le mauvais pronostic est lié à des récidives locales ou distantes (métastases).
Dans la continuité de leurs travaux réalisés sur le rôle des microARN dans la physiopathologie de ce cancer [1-3], des chercheurs de l’Irig ont mené une nouvelle étude [4] visant à identifier des miR marqueurs moléculaires non-invasifs (simple prise de sang) et utilisables en routine clinique pour l’évaluation pronostique dans un délai très court après la chirurgie. Sur la base de leurs travaux antérieurs, ces chercheurs ont quantifié les niveaux circulants de quatre miR candidats dans des échantillons de sérum prélevés dans les 3 mois après ablation de la tumeur. Ils ont montré que miR-483-5p est significativement plus abondant dans le sérum des patients ayant récidivé dans les 3 ans après chirurgie, comparés à ceux qui n’avaient pas récidivé [4]. Des analyses statistiques ont permis de déterminer un seuil en nombre de copies de miR-483-5p qui permet de distinguer ces deux types de patients avec une spécificité de 100 % et une sensibilité de 61,5 %. Les patients ayant des valeurs de miR-483-5p en dessous de ce seuil ont une survie sans récidive ainsi qu’une survie globale significativement plus élevée (Figure). Plus important encore, une analyse statistique multivariée a révélé que miR-483-5p est un facteur pronostique indépendant des facteurs pronostiques classiquement utilisés, dont la performance est supérieure à celle de la taille de la tumeur, le stade tumoral ENSAT et l’index de prolifération Ki67.

Cette étude montre pour la première fois que miR-483-5p, dosé en post-opératoire dans les 3 mois post-chirurgie, est un biomarqueur puissant pour le pronostic du CCS. Ce test permettrait de prendre en charge de façon non-invasive les patients porteurs de ce cancer et offre pour l’avenir, la perspective d’une intégration des miR en routine clinique pour le diagnostic/pronostic du CCS.


Courbes de survie de patients porteurs de CCS en fonction de leur niveau de miR-483-5p circulant en post-opératoire.
Le sérum a été prélevé dans un intervalle de 3 mois après chirurgie. Un niveau élevé de miR-483-5p circulant (High miR-483-5p : nombre de copies supérieur au seuil défini dans l’étude) est un facteur prédictif péjoratif de la survie sans récidive (miR-483-5p haut : médiane de survie sans récidive à 1 an ; miR-483-5p bas : médiane de survie au-delà de 8 ans et demi). Il est également un facteur prédictif péjoratif de la survie globale (miR-483-5p haut : médiane de survie globale à 3 ans et demi ; miR-483-5p bas : médiane de survie au-delà de 12 ans).

Cette étude a été réalisée dans le cadre du réseau européen ENSAT (European Network for the Study of Adrenal Tumors) sur une cohorte rétrospective de 48 patients non-métastatiques au diagnostic et opérés à l’hôpital universitaire de Würzburg (Allemagne).

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