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Le CEA sur le front du séquençage du SARS-CoV-2


​Depuis l’émergence du variant anglais, les équipes du Centre national de recherche en génomique humaine du CEA (CNRGH), grâce à leur expertise technique et scientifique, participent au séquençage complet du SARS-CoV-2, technologie indispensable pour identifier les évolutions du virus et lutter efficacement contre sa propagation. Explications de Jean-François Deleuze, son directeur.

Publié le 1 mars 2021

​Comment vous êtes-vous préparés à séquencer de façon massive le virus SARS-CoV-2 et ses variants ?

Dès le mois d’avril 2020 et bien que confinées, les équipes du Centre national de recherche en génomique humaine (CNRGH) du CEA se sont mobilisées pour mettre en place au sein de notre infrastructure le séquençage du SARS-CoV-2, dans le cadre du projet Seqcovid. Pendant le premier confinement, nous avons développé toute la partie théorique, commandé les réactifs nécessaires, puis nous avons commencé à séquencer l’ARN du virus dès le retour au laboratoire au mois de mai. Après des premiers tests prometteurs, nous avons utilisé, fin 2020, des premiers prélèvements humains venant d’un laboratoire d’analyse médicale français. Il s’agit de prélèvements nasopharyngés inactivés par la chaleur et anonymisés. Nous savons qu’ils ont été réalisés en France, mais nous ignorons où et sur qui. Ils nous ont servi à calibrer à la fois les quantités d’ARN à séquencer mais également les filtres bio-informatiques à utiliser pour une détection optimale du virus.

Par ailleurs, nous avons également pu utiliser les ARN de différents variants viraux afin de vérifier que nos logiciels étaient bien capables de les détecter.

Le CNRGH est donc désormais prêt à se lancer dans le séquençage du virus dans la population française.

L’enjeu est important : plus on séquence, plus on va repérer de variants, et potentiellement parer les effets de ceux à la contagiosité accrue le plus vite possible. L’apparition de ces variants confirme la nécessité d’un séquençage massif de la population positive à la COVID-19 et le CNRGH est une plateforme capable de répondre à ce besoin.

Nous avons réalisé l’analyse des échantillons issus du dépistage massif qui a eu lieu à Roubaix à la mi-janvier où nous avons pu détecter la présence du variant anglais chez 5 des 76 individus dont les échantillons étaient exploitables pour le séquençage.

Depuis quelques semaines, un système de surveillance des variants, par séquençage, est en cours de mise en place au niveau national en mobilisant des laboratoires experts en microbiologie et génomique. Le CNRGH, quant à lui, pourra agir en tant que conseil et dans le cadre de programmes de recherche.

D’où viennent les variants ?

L’apparition de variants est intrinsèque à la vie et à la propagation d’un virus. Par exemple, la reformulation annuelle du vaccin contre la grippe nous permet d’optimiser la vaccination contre de nouveaux variants. Même s’ils portent les noms des endroits où ils ont été découverts, les variants du SARS-Cov-2 ne sont pas forcément spécifiques à un pays ou une région et ils circulent avec les voyageurs. On les trouve parce qu’on les cherche. Par ailleurs, on doit aussi noter que les mesures sanitaires prises par un pays changent l’environnement dans lequel évolue un virus et peuvent donc influencer l’émergence et l’installation de certaines variations.

Comment identifier un variant contagieux ?

On regarde tout d’abord où se situe la mutation : si elle se situe au niveau des gènes fonctionnels (codant par exemple la protéine Spike, la clé d’entrée du virus dans la cellule), ou au niveau des gènes de virulence, cela va éveiller notre intérêt. Ensuite, il faut suivre les métadonnées cliniques et épidémiologiques associées qui témoigneraient de sa plus grande morbidité ou de l’augmentation de sa fréquence traduisant une plus grande contagiosité. Enfin, tous les patients contaminés par un de ces nouveaux variants devraient être suivis sur le long terme, pour voir, par exemple, si les formes de sévérité de la maladie sont différentes ou si l’on enregistre une résistance à la vaccinothérapie.

Quels sont les autres projets dans la connaissance de SARS-CoV-2 sur lesquels le CNRGH travaille ?

Parallèlement, nous avons lancé un certain nombre de programmes de recherche, comme le GWAS national (Genome Wide Association Study), en collaboration avec l’Institut Pasteur et l’Institut Imagine. L’objectif est de rechercher des gènes de prédisposition chez les patients français atteints de formes sévères de la maladie, qui pourraient expliquer pourquoi certaines personnes sont plus disposées que d’autres à développer des formes graves.
Un travail colossal, qui n’aurait pas pu voir le jour sans des équipes formidables (gestion des échantillons, séquençage, bioinformatique, statistique…), qui sont fières de participer à une croisade antivirale dans des conditions souvent difficiles, parce qu’on pense qu’on peut et donc qu’on doit agir !


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