Le Roi-Soleil a régné 72 ans et laissé dans les livres d'histoire l'image d'un souverain éclatant. Pourtant, sur la fin de sa vie, sa santé décline et plusieurs maux le frappent. Il est en surpoids, ses artères sont obstruées par le cholestérol. Une opération dentaire mal exécutée le prive d'une partie de son palais. Louis XIV a perdu de sa superbe.
Le 10 août 1715, il se plaint d'une forte douleur au pied et des tâches noires apparaissent progressivement sur sa peau. Il mourra le 1er septembre, officiellement de la gangrène, une nécrose progressive des tissus biologiques. C'est pourtant une infection rarissime qui a emporté le monarque.
50mg de preuve
Trois siècles plus tard, Philippe Charlier, Médecin légiste et Anthropologue, confie un fragment du cœur de Louis XIV au Laboratoire d'innovations pour la Détection et le Diagnostic (Li2D) du CEA à Marcoule. Son organe avait été conservé dans un cardiotaphe en métal. Le chercheur, passionné par les cold case historiques veut mieux comprendre de quoi souffrait le Roi-Soleil.
Les équipes du CEA, spécialisée dans la détection des maladies infectieuses et des agents pathogènes, soumet ce tout petit fragment de 50 mg à une analyse par spectrométrie de masse à haute résolution. Le but ? détecter les protéines contenues dans ce morceau de cœur. « Le spéctromètre de masse fonctionne comme une balance de précision », indique Jean Armengaud, Directeur du Li2D. « Tous les peptides contenus dans l'échantillon sont détectés et la composition moléculaire exacte de chacun est établie ! ».
L'origine des tâches
L'analyse révèle la manière dont le cœur a été conservé. Les protéines découvertes permettent de comprendre quelles techniques d'embaumement ont été utilisées. Mais surtout, elle permet d'identifier la présence d'un champignon : le Cyphellophora europaea. Celui-ci provoque des ulcères et des abcès chez sa victime et peut engendrer une maladie rare : la chromoblastomyctose. Le souverain, déjà affaibli a donc été emporté par un champignon.
« Les tâches noires découvertes sur la peau de Louis XIV quelques semaines avant sa mort ne sont donc pas dues à la gangrène, mais au champignon lui-même », révèle Jean Armengaud. Le diagnostic était presqu'impossible à l'époque. Seuls quelques dizaines de cas sont aujourd'hui répertoriés en France. L'autopsie avait donc concluà l'époque à la cause la plus évidente en l'état des connaissances : la gangrène.
Les résultats de cette étude ont fait l'objet d'une publication scientifique dans les Annales pharmaceutiques françaises, disponible ici : https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0003450925001506?via%3Dihub