Le monde n’a jamais autant utilisé de matières plastiques, avec une production annuelle de 500 millions de tonnes. Malheureusement, du fait d’une gestion déficiente des déchets plastiques au niveau global, on estime que 10 millions de tonnes de plastiques sont relâchées annuellement dans les mers et océans (Réf. USA annals of global health. DOI: 10.5334/aogh.2831). Ces déchets plastiques, dont la dégradation totale se compte en décennies voire en siècles, se fragmentent tout d’abord en micro-plastiques (taille de moins de 1mm), puis en nanoplastiques (taille de moins de 1 micromètre). Ces micro et nanoplastiques se retrouvent partout sur terre, des abysses au sommet des montagnes en pas-sant par les glaces polaires. Les êtres vivants y sont donc exposés en permanence, et les humains ne font pas exception. Afin de mieux comprendre les effets de ces particules de plastiques sur nos cel-lules, des chercheurs du CEA-Irig/LCBM ont étudié les effets de particules plastiques sur les cellules immunitaires chargées dans l’organisme de la gestion des particules (y compris les particules biolo-giques comme les bactéries et les virus), les macrophages. Les macrophages jouent également un rôle pivot dans l’immunité, en particulier via les réactions inflammatoires. Quels sont les effets des plas-tiques sur nos cellules immunitaires ?
Pour répondre précisément à cette question, les chercheurs ont étudié les effets de deux particules plastiques différentes sur les macrophages. D ’une part des particules de poly (ethylène téréphthalate) ou PET, composant entre autres les bouteilles plastiques des boissons, et connu pour libérer des particules dans les liquides qu'il contient. D’autre part des particules de polycaprolactone (PCL), un plastique biodégradable très étudié actuellement pour remplacer les plastiques classiques de type polyethylene-polypropylène, faiblement biodégradables, dans des applications comme l’emballage.
Les chercheurs ont ainsi montré que ces deux particules induisent des effets très différents dans les macrophages. Les particules de PET provoquent un stress dans les cellules, en particulier un stress oxydant, et induisent aussi une réponse pro-inflammatoire de la part des macrophages exposés au PET (voir Figure). En outre, les macrophages exposés au PET ont une réponse perturbée aux micro-organismes et seraient moins efficaces dans leur rôle de défense.
Quant aux macrophages exposés à la PCL, ils ne montrent pas de signes de stress cellulaire. En revanche, ils montrent une inhibition marquée de leurs fonctions spécialisées, que ce soit la phagocytose (capacité à retirer des particules de l’organisme) ou la mise en place d’une réaction inflammatoire en présence d’un stimulus bactérien (voir Figure). Ils sont donc au global moins performants pour lutter contre une agression externe.
En conclusion, les particules de plastiques ne sont pas sans conséquences sur les fonctions de nos cellules immunitaires. Si ces conséquences sont différentes d’un plastique à l’autre, les particules plastiques peuvent altérer le délicat équilibre du système immunitaire.

Figure : schéma d’étude des effets des nanoplastiques sur les macrophages : les macrophages (en violet) sont exposés en culture à une concentration non létale de nanoplastiques (billes figurées en vert ou en bleu, diamètre 200 nm) pendant 24 heures. A la fin de cette exposition, les cellules sont récoltées et testées pour différents paramètres. La figure indique les conclusions principales résultant de ces observations.
Collaborations
- Chemistry and Biology of Metals, CNRS UMR5249, CEA, IRIG-LCBM, Univ. Grenoble Alpes, France
- Univ. Grenoble-Alpes, CEA, CNRS, Grenoble-INP, IRIG, SyMMES, CIBEST, Grenoble, France
- Institut de Biologie Structurale, Université Grenoble Alpes, CEA, CNRS, Grenoble, France
- Group of Mutagenesis, Department of Genetics and Microbiology, Faculty of Biosciences, Universitat Autonoma de Barcelona, Cerdanyola del Valles, Barcelona, Spain
- Facultad de Recursos Naturales Renovables, Universidad Arturo Prat, Iquique, Chile
- Laboratoire de Spectrométrie de Masse BioOrganique (LSMBO), IPHC UMR 7178, CNRS, Université de Strasbourg, 67087 Strasbourg, France
- Infrastructure Nationale de Protéomique ProFI – UAR 2048, 67087 Strasbourg, France
Financements
- Ces travaux ont été conduits dans le cadre du projet Européen PlasticHeal (Horizon 2020#965196).
- Ils sont aussi soutenus par l’ANR (projet Plastox, ANR-21-CE34-0028-04)