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Soutenance de thèse

Condensats d'exciton-polariton hors équilibre : Propriétés statistiques et régimes universels en une et deux dimensions

​Jeudi 20 novembre à 14:00, Institut Néel, Salle 421, bâtiment G , 25 Avenue des Martyrs, Grenoble

Publié le 20 novembre 2025
Félix Helluin

Modélisation et Exploration des Matériaux, I​​nstitut de Recher​che Interdisciplinaire de Grenoble ​
​Institut Néel, CNRS​
De nombreux systèmes, classiques ou quantiques, fermés ou ouverts, présentent des propriétés universelles. La condensation de Bose-Einstein est un phénomène emblématique dans la matière quantique, décrivant l'occupation macroscopique de l'état quantique fondamentale lorsqu'un paramètre de contrôle externe est ajusté. Dans cette thèse, nous nous intéressons à un type de condensat dissipatif formé par des exciton-polaritons. Ces quasi-particules sont créées par le pompage laser continu d'une microcavité semi-conductrice. Les photons injectés dans la cavité interagissent fortement avec les paires électron-trou, conduisant à une transition de condensation au-dessus d'un seuil de pompe. Dans ce travail, nous étudions l'émergence de caractéristiques clés des quasi-condensats de Bose-Einstein (BEC) à basse dimension dans les systèmes EP, à la fois en une et deux dimensions. Une caractéristique importante et largement étudiée des BEC à faible interaction réside dans l'énergie de l'état fondamental, en particulier dans la manière dont elle est affectée par des fluctuations quantique. Ces fluctuations décalent le spectre du condensat vers de plus hautes énergies, qui va au-delà des prédictions de champ moyen. Nous prédisons un effet analogue dans les condensats EP, cette fois induit par des fluctuations stochastiques provenant des gain et de pertes répétés dans la microcavité. En l'absence de défauts topologiques, nous calculons les corrections stochastiques du blueshift du condensat dans l'approximation de Bogoliubov.
Ces prédictions sont ensuite comparées aux simulations numériques d'un condensat de polariton unidimensionnel. Dans ce contexte, nous mettons en évidence que les corrections du blueshift peuvent être interprétées comme la vitesse asymptotique d'une interface stochastique croissante. Cette interprétation découle de la correspondance entre la dynamique de phase effective et l'équation de Kardar-Parisi-Zhang (KPZ), qui décrit les propriétés universelles de la dynamique de surfaces rugueuses. Une deuxième caractéristique importante des condensats de Bose-Einstein réside dans leurs propriétés de cohérence. En deux dimensions et à basse température, ils présentent une phase quasi-ordonnée caractérisée par une décroissance algébrique de la fonction de corrélation du premier ordre. Au-delà d'une température critique, décrite par le mécanisme Berezinskii-Kosterlitz-Thouless (BKT), des paires vortex-antivortex sont nucléées dans le condensat, conduisant à une phase désordonnée avec une décroissance exponentielle des corrélations. Ces dernières années, un mécanisme similaire a été proposé pour les EP, en concurrence avec la physique émergente de KPZ, entravant son émergence. Alors que plusieurs études ont suggéré qu'une phase KPZ pourrait encore être accessible dans les expériences, une compréhension unifiée de ces scénarios concurrents dans des conditions réalistes est restée manquant​e.
Grâce à des simulations numériques de la dynamique du condensat, nous démontrons que la non-linéarité effective de la phase du condensat peut être finement ajustée sur une large plage en faisant varier la force d'interaction EP. Ce niveau de contrôle permet d'explorer trois régimes universels, dans un régime de paramètres compatibles avec les plateformes expérimentales actuelles : le régime Edwards-Wilkinson (EW) faiblement non linéaire ; le régime KPZ fortement non linéaire, où les fluctuations de phase du condensat augmentent de manière superdiffusive, conduisant à une rugosité de la phase ; et une phase dominée par les vortex émergeant lors d'interactions plus fortes, où la dynamique de la densité et de la phase joue un rôle important. La signature de chacune de ces phases est mise en évidence par la décroissance de la fonction de corrélation de premier ordre du condensat, ses effets de taille finie, ainsi que ses statistiques de fluctuation.