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Les fleurs ne sont pas des potiches

C’est un documentaire à ne pas manquer : le 19 mai prochain à 21h, France 5 diffuse L’abominable mystère des fleurs, réalisé à partir d’un ouvrage du généticien François Parcy. L’occasion de relire son billet sur les fleurs, présentes sur Terre depuis 174 millions d’années, qui nous renseignent sur le passé mais nous donnent aussi des clés pour notre futur et les bouleversements climatiques à venir.
Publié le 13 juin 2019
« Comment voudriez-vous que je parle des fleurs », écrivait Aragon dans son poème de résistance J’écris dans un pays dévasté par la peste, au cœur de l’année 1943. Luxe suprême en temps d’occupation, les époques de paix se prêtent mieux à la dilettante activité consistant à parler des fleurs ou même à tenter de les comprendre, comme le font de nombreux chercheurs, dont ceux de mon équipe au Laboratoire de physiologie cellulaire & végétale (CNRS-CEA-Inra-Université de Granoble Alpes).

Pour tout un chacun, la fleur c’est l’arrivée du printemps et son cortège d’arbres lumineux et de prairies colorées. Ce sont aussi les bouquets de roses venues d’Équateur après un long voyage carboné. Ou encore les fleurs produites dans les serres des Pays-Bas qui dessinent, dans les matins glacés, un damier lumineux à grand renfort de chauffage et d’éclairage. Les fleurs seraient-elles un luxe même en temps de paix des hommes mais de guerre contre le changement climatique ?

Le groupe des plantes à fleurs contient la majorité des espèces, soit plus de 90 % des 400 000 espèces de plantes répertoriées.

Ce serait oublier que les fleurs ne se résument pas à leur fonction ornementale. Elles sont aussi directement à la base de la formation des fruits et des graines qui nous nourrissent. Certaines éclatantes comme chez le cerisier ou le colza, d’autres plus discrètes comme chez le blé ou le maïs. Mais de façon plus générale, feuilles, tiges, tubercules ou racines que les humains ou les animaux d’élevage consomment proviennent en quasi-totalité de plantes « à fleurs ».

Ce groupe contient en effet aujourd’hui la majorité des espèces (plus de 90 % des 400 000 espèces de plantes répertoriées). Celles-ci sont bien plus nombreuses que les mousses, fougères ou gymnospermes, des plantes issues de familles anciennes qui n’avaient pas encore acquis la fleur, cette innovation diablement efficace pour la reproduction.

Étudier les plantes à fleurs et leur façon de se reproduire, comprendre leur passé et anticiper leur futur reste un enjeu de recherche très actuel. On essaie de comprendre à quoi pouvait ressembler la première fleur, celle qui a donné naissance à toutes les autres, de la fleur géante de l’arum titan à la petite fleur de myosotis. Une équipe internationale emmenée par Hervé Sauquet du laboratoire Écologie, systématique et évolution2 en a récemment fait le portrait-robot avec des arrangements de pétales en couronne autour d’une fleur bisexuée alors qu’on l’imaginait plutôt mâle ou femelle avec des pétales en spirales. En 2017, l’équipe de Jérôme Salse du laboratoire Génétique, diversité, écophysiologie des céréales, de Clermont-Ferrand, en a fait son portrait moléculaire, en prédisant le contenu de ses chromosomes et la date de son apparition, une question encore non résolue et qui fait débat dans la communauté.


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Article paru dans le journal du CNRS du 13 juin 2019 et mis à jour le 13 mai 2022.