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Beauté fractale

Le mystère de la forme des choux romanesco vient d’être élucidé. Une histoire de bourgeons qui ne fleurissent jamais...
Publié le 1 octobre 2021
Article paru dans le n° 245 des Défis du CEA 

Quel est le point commun entre une feuille de fougère, un flocon de neige et un chou romanesco ? La beauté mathématique, celle des structures fractales. Ces objets portent en eux des motifs géométriques similaires se répétant, comme à l’infini, à des échelles de plus en plus petites. Pour comprendre les dessous génétiques de la croissance si parfaite du romanesco, les chercheurs ont combiné génie génétique et modélisation mathématique.

Des petits choux empilés

« Nous avons travaillé avec une plante très utilisée en laboratoire, Arabidopsis thaliana. Chez cette cousine du chou, nous savions que deux mutations génétiques suffisaient pour changer les fleurs en petits choux », indique François Parcy, directeur de recherche CNRS au CEA-Irig. Au fil des expériences, les chercheurs découvrent pourquoi chez les choux, les bourgeons ne parviennent pas à donner des fleurs. Ils se transforment en tiges qui à leur tour tentent de produire des fleurs, et ainsi de suite. Le tout provoque une accumulation ramassée de tiges sur tiges, formant un empilement de petits choux. « Il y a un va-et-vient entre activation des gènes gouvernant la formation des fleurs et ceux des tiges, dû à des systèmes perturbés de régulation des gènes, par le biais de mutations. Mais si on ne cueille pas le chou, la plante finira quand même par produire une multitude de fleurs, puis des graines. » Si tous les choux construisent des structures fractales, ces dernières sont exacerbées chez le romanesco : « un paramètre diffère, expliquant sa structure pyramidale, précise le généticien. Ses tiges produisent des bour- geons de plus en plus rapidement alors que ce rythme de production est constant chez le chou-fleur ».

Une sélection artificielle séculaire

Chou romanesco, de Bruxelles, chou-rave, chou-fleur... tous résultent d’une sélection artificielle à partir d’une seule espèce ancestrale. Sans le savoir, l’humain a en effet accumulé sur des siècles d’importants changements génétiques dans ces plantes, modifiant de façon drastique leur apparence. « C’est d’ailleurs le cas de toutes les plantes que l’on consomme. Bien souvent, elles sont aussi devenues plus fragiles, en perdant par exemple des gènes de résistance naturelle, déplore le chercheur, qui se prend à envisager une domestication de novo. Cette approche consiste à revenir à des plantes ancestrales, naturellement résistantes aux insectes et maladies, ou peut-être même, plus aptes à faire face au changement climatique ; puis à les domestiquer avec seulement quelques modifications génétiques ciblées, comme celles que nous venons de découvrir chez le chou romanesco ».



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