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Grotte andalouse de Nerja : des datations de stalagmites perturbées par des transformations minéralogiques


​Une collaboration franco-espagnole impliquant le LSCE (CEA-CNRS-UVSQ) a analysé deux stalagmites de la grotte de Nerja (Andalousie) afin d'éclairer les archéologues. Question : le niveau noir observé dans l'une d'elles est-il formé de suie et quel est son âge ?

Publié le 29 septembre 2022

Découverte en 1959 en Andalousie, près de Malaga, la grotte de Nerja abrite des parois ornées de très nombreux motifs et points, de représentations animales, parmi lesquelles un bouquetin, devenu l'emblème du lieu. Afin de préciser la chronologie de l'occupation humaine de la grotte, les archéologues collaborent avec des experts de la datation d'archives paléoclimatiques.

Des climatologues du LSCE ont ainsi étudié des échantillons prélevés sur deux stalagmites de la grotte par différentes méthodes de datation (uranium-thorium et carbone 14) et ont confronté leurs résultats à une étude stratigraphique, s'appuyant sur des analyses par spectrométrie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR).

Cette dernière technique révèle que la première stalagmite est formée d'aragonite – un minéral métastable, composé de carbonate de calcium CaCO3 et de traces de métaux, qui cristallise dans des milieux particuliers, notamment à partir d'eaux contenant beaucoup de magnésium. En revanche, la seconde stalagmite, présente dans certains niveaux, des traces de transformation d'aragonite en calcite – un minéral différant de l'aragonite par la composition de ses éléments traces.

Dans le cas de la stalagmite purement aragonitique, les âges U/Th et 14C sont compatibles et en cohérence stratigraphique. Au contraire, la seconde stalagmite présente des inversions d'âges du chronomètre U/Th dans les zones de recristallisation d'aragonite en calcite, alors que les âges carbone 14 restent en cohérence stratigraphique tout au long de l'échantillon. Le chronomètre 14C semble donc rester valide dans le cas des transformations minéralogiques observées, tandis que les âges U/Th sont faussés par l'expulsion d'atomes d'uranium au cours de la transformation cristalline.

L'analyse du niveau noir a confirmé qu'il s'agit bien de dépôts de suie fossilisée, attribués à des feux entretenus par des occupants de la grotte entre 7.900 et 5.500 ans avant aujourd'hui.

Les observations faites sur ces deux stalagmites seront très utiles pour les recherches sur la chronologie de l'art pariétal, fondées sur les datations croisées U/Th et 14C et l'analyse minéralogique des voiles carbonatés recouvrant des œuvres pariétales, pour lesquels la taille du prélèvement est très limitée.

Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec le laboratoire Geosciences Paris Saclay (GEOPS), PACEA (De la préhistoire à l'actuel : culture, environnement et anthropologie) à Bordeaux, les Universités de Cordoue et de Grenade et l'Institut andalou des sciences de la Terre (CSIC-UGR) à Grenade (Espagne).

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