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Technique de collage direct de matériaux 2D scalables pour l’industrie


​​​Le CEA-Leti innove avec une méthode inédite permettant d'intégrer du disulfure de molybdène (MoS₂) sur des plaquettes de silicium de 200 mm à l'aide d'un collage moléculaire direct. Cette approche innovante permet de répondre à des enjeux d'intégration de matériaux 2D dans les procédés de fabrication standards de semi-conducteurs.

Publié le 20 mai 2025

​Le MoS₂, un matériau à deux dimensions, fait l'objet de toutes les attentions en raison de ses propriétés uniques, qui font de lui un candidat intéressant pour les applications de transistor à effet de champ (FET) et optoélectroniques telles que les photodétecteurs, les cellules solaires et les dispositifs électroluminescents. Néanmoins, les méthodes traditionnelles de synthétisation du MoS₂ de haute qualité imposent fréquemment un dépôt chimique en phase vapeur (CVD) haute température sur des substrats tels que le saphir, à des températures supérieures à 600 °C. Ces conditions sont incompatibles avec les lignes de fabrication standards de la microélectronique sur silicium. Le MoS2 ne peut donc pas être déposé directement, il doit être transféré après croissance.​

Amélioration du rendement et intégration aux procédés de fabrication standards

Cette technique innovante consiste à transférer du MoS₂ directement sur un substrat en silicium à basse température. La croissance de couches de MoS₂ est faite sur une plaquette donneuse à haute température. Pour faire le transfert, cette plaquette donneuse est collée sur une plaquette de silicium cible via un collage moléculaire direct, une méthode basse température qui forme un collage au niveau atomique sans adhésif ni couche intermédiaire. Les plaquettes ainsi collées sont ensuite séparées à l'aide d'une technique d'insertion d'une lame de précision, au cours de laquelle les plaquettes sont immergées dans de l'eau. En raison des différents niveaux hydrophobes des plaquettes donneuse et cible, la séparation se produit au niveau de l'interface souhaitée.

Lucie Le Van-Jodin, chercheuse-ingénieure au CEA-Leti, détaille : « Nous avons été en mesure de créer un procédé applicable à l'industrie. Comme, la croissance de couches de haute qualité exige des procédés à haute température et des substrats de croissance spécifiques tels que le saphir, une étape de transfert s'impose. Cette étape générait des défauts et était principalement développée en laboratoire. » 

L'une des caractéristiques remarquables de cette nouvelle technique est sa comptabilité avec les environnements de salle blanche existants. En fonctionnant dans des conditions de fabrication standards, le procédé garantit un rendement élevé et un nombre minimal de défauts. L'équipe a ainsi obtenu un taux de transfert de plus de 95 %, une amélioration significative par rapport aux méthodes précédentes. Ce rendement élevé est attribué à un contrôle méticuleux des procédés de collage et décollage, en particulier de la vitesse d'insertion de la lame pendant la séparation des plaquettes.

La caractérisation, la preuve d'excellents résultats

« L'un des principaux aspects de nos travaux réside dans le fait que nous avons réalisé une caractérisation détaillée de ces surfaces 2D après transfert. Nous avons analysé l'intégralité de la surface de la plaquette, sans nous limiter à une seule partie », explique Paul Brunet, chercheur-ingénieur au CEA-Leti.

L'équipe a employé plusieurs techniques d'analyse telles que la spectroscopie Raman et la spectroscopie de photoélectrons induits par rayons X (XPS) pour confirmer la préservation de la structure chimique du MoS₂. Des analyses par microscope à force atomique (AFM) et par microscopie électronique à balayage (SEM) ont en outre révélé l'absence de défauts mécaniques tels que des fissures ou des plis et ont confirmé l'absence de résidus.​

Cette caractérisation étendue souligne la robustesse du procédé et son potentiel à être intégré au sein d'applications industrielles. La possibilité de transférer du MoS₂ de haute qualité sur des plaquettes de silicium permet de relever un défi stratégique et ouvre la voie à de nombreuses applications, notamment les dispositifs de mémoire, la technologie de commutation et les photodétecteurs. Le potentiel d'adaptation du procédé suggère qui plus est la possibilité d'étendre cette technique à d'autres matériaux 2D, pour élargir encore davantage son champ d'application.

Savoir-faire et équipements de pointe

Le succès de ce projet est profondément dû au savoir-faire étendu et aux installations de pointe du CEA-Leti. 

« Nous avons été en mesure d'obtenir ce résultat grâce au savoir-faire de longue date du CEA dans le domaine des technologies de collage, ainsi qu'à un accès à des salles blanches avancées de fabrication de matériaux 2D et de plaquettes de 200 mm », souligne Lucie Le Van-Jodin.

À l'avenir, le CEA-Leti espère affiner le procédé, dans l'objectif, par exemple, d'éliminer l'utilisation d'eau pendant la séparation des plaquettes et d'adapter la technique pour des substrats autres que le silicium. Ces avancées pourraient rationaliser encore davantage l'intégration de matériaux 2D à la fabrication de semi-conducteurs, en ouvrant la voie à la création de nouveaux dispositifs électroniques et optoélectroniques aux performances optimisées et aux dimensions réduites.


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