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Interview | Santé & sciences du vivant

Manuel Théry - Le cytosquelette cellulaire

En construisant des carrés ou des triangles à l’échelle microscopique Manuel Théry montre que la cellule ‘ressent’ son environnement géométrique. Depuis 2012, il mène un projet de recherche ERC sur le cytosquelette cellulaire.


Enfant, ce géotrouvetou voulait « inventer des machines extraordinaires » et se destinait plutôt à une carrière d’ingénieur mécano que de chercheur. C’est les mains dans le cambouis des cellules qu’on le trouve aujourd'hui, à l’hôpital St Louis, où il a pris ses quartiers avec dix de ses collaborateurs. Comment en est-il arrivé là ? « Un coup de foudre esthétique à un cours de l’ESPCI  a tout déclenché, raconte Manuel Théry. J’étais fasciné par les images de microscopie électronique qui montraient l’architecture du squelette des cellules. Une structure dynamique qui se fait et se défait, avec une symétrie d’ordre 3, une rosace vivante et magnifique… » Le jeune homme veut comprendre comment s’organise le réseau de câbles qui irradie la cellule à partir de son centre (centrosome) et la fait se mouvoir. 

Nous sommes en 2000. Lors d’une discussion informelle à la terrasse d’un café, il apprend que le « pape du centrosome » travaille à l’Institut Curie, de l’autre côté de la rue ! Et c’est la rencontre d’un « jeune excité et d’un vieux sage », Michel Bornens, qui le mènera à démarrer une thèse et se diriger vers la recherche. Manuel Théry est alors devenu le spécialiste de la mécanistique de la cellule, étudiant les forces qui déterminent les déplacements et la vie de la cellule, via les filaments d’actine et les microtubules arrimés au centrosome, que l’on peut assimiler respectivement à leurs muscles et leur système nerveux. La consécration est rapide avec une publication dans Nature Cell Biology en 2005 où il révèle que la cellule n’est pas sensible qu’à la chimie, mais aussi la géométrie de son environnement. C’est en construisant des carrés ou des triangles à l’échelle microscopique que le scientifique montre que la cellule ‘ressent’ la forme sous-jacente, s’y accroche, s’y déforme. « Nous avons formulé les équations qui déterminent l’orientation de l’axe de la division. Quel scoop ! », se souvient-t-il. 

Manuel Théry intègre le CEA en 2006 et participe à la création de la start-up Cytoo, qui met à profit son savoir-faire en micro-technologies pour proposer à la communauté scientifique des micro-structures sur lesquelles les biologistes peuvent étudier l’influence de la géométrie de l’environnement sur la transcription du génome, la division des cellules, la façon dont elles s’assemblent, fusionnent, migrent. Le succès est planétaire. Il s’associe ensuite avec Laurent Blanchoin, biochimiste, pour reconstituer les principes de base de construction des architectures intracellulaires avec des mélanges minimalistes à base de protéines purifiées. 

Le chercheur s’intéresse aujourd'hui aux cellules souches. Les changements de conformation spatiale de leur niche vont influencer le taux de prolifération, la nature des cellules produites. « Si la stimulation hormonale est le facteur principal, la géométrie de la niche a un impact sur la population cellulaire », explique Manuel Théry. D’où l’idée d’implanter une antenne de son laboratoire à l’hôpital St Louis, reconnu pour son expertise en thérapie cellulaire pour les maladies sanguines. « Si on était capable de mieux contrôler la quantité et la nature des cellules du sang produites en culture, cela aurait un impact direct sur le protocole thérapeutique », ambitionne-t-il.
Manuel Théry (Institut de biosciences et biotechnologies de Grenoble) dirige un projet de recherche sur le cytosquelette cellulaire. Ce projet, baptisé Spicy a été sélectionné en 2012 par l’European Research Council et bénéficie d’un financement de 1,4 M€ sur cinq ans.

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Centre : Grenoble
Expertise : Cytosquelette