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La chimie pour l’énergie

Chimie pour les énergies renouvelables - Partie 1


L’apport de la chimie est incontestable, tant au niveau de la production que des applications, surtout dans un contexte de non-émission de gaz à effet de serre.

Publié le 1 décembre 2012

​Pour que les nouvelles technologies de l’énergie trouvent leur place dans le mix énergétique à côté des énergies fossiles et nucléaire, elles doivent relever plusieurs défis : compétitivité, facilité d’approvisionnement et d’utilisation, sûreté, rentabilité.

Vérification de modules photovoltaïques après encapsulation

Vérification de modules photovoltaïques après encapsulation. © L.Chamussy/Sipa-CEA


Le solaire photovoltaïque

INES
Créé en 2006, l’Institut national de l’énergie solaire (INES) est le centre français de référence et l’un des premiers en Europe dans le domaine de l’énergie solaire.
En regroupant à terme plus de 500 personnes sur environ 20 000 m² de locaux, il répond aux besoins d’innovation de la filière solaire émergente.


VidéoInstitut National des Energies Solaires (INES)



Recherche en chimie des nanomatériaux pour les cellules solaires
Recherche en chimie des nanomatériaux pour les cellules solaires. © P. Avavian/CEA

Préparation de cellules solaires photovoltaïques souples en boîte-à-gants, sous azote
Préparation de cellules solaires photovoltaïques souples en boîte-à-gants, sous azote. Une fois encapsulées, elles ne sont plus sensibles ni à l’oxygène, ni à l’humidité. © L.Chamussy/Sipa-CEA

Une cellule photovoltaïque classique est constituée de silicium (abondant à la surface terrestre) dopé « p » (avec des atomes de bore) et « n » (avec des atomes de phosphore). Ce mode de production d’électricité est très minoritaire en France (1 %) et concurrencé par l’utilisation du silicium en microélectronique.

Le cristal de silicium (atome tétravalent) contient, à température ordinaire, des charges mobiles négatives « n » (les électrons) et des charges mobiles positives « p » (les trous) en nombre égal et peu important (c’est un semi-conducteur). En le dopant avec des atomes comportant cinq électrons de valence (comme le phosphore) on augmente le nombre de charges mobiles négatives « n » et on crée des sites positifs fixes « p » (les atomes de phosphore). On dit que le dopage est de type « n ». Inversement, en introduisant des atomes possédant trois électrons de valence (comme le bore) on crée des sites négatifs fixes « N » (les atomes de bore) et des trous mobiles majoritaires « Ρ ». Le dopage est dit de type « p ».

Si l’on juxtapose ces deux sortes de semi-conducteurs (jonction p-n), les charges mobiles majoritaires migrent de chaque côté de la jonction et se recombinent avec celles qu’elles rencontrent de l’autre côté. Une zone de transition est ainsi créée où il n’y a presque plus de charges mobiles mais où restent les charges fixes, « Ρ » du côté « n » et « N » du côté « p ». Ces charges fixes créent alors un champ électrique qui stoppe la migration des charges mobiles. Si maintenant la jonction est éclairée, les photons incidents forment de nouvelles paires électron-trou qui, si elles apparaissent dans la zone de transition, sont accélérées par ce champ. Le côté « n » s’enrichit donc en électrons libres et le côté « p » en trous mobiles. La jonction p-n est alors devenue un dipôle polarisé qui se comporte comme un générateur avec le côté « p » comme borne plus et le côté « n » comme borne moins. On a ainsi converti l’énergie lumineuse en énergie électrique.

La recherche actuelle porte sur tous les éléments d’une installation photovoltaïque : cellules, regroupées en modules, eux-mêmes organisés en systèmes électriques.

Pour accroître l’efficacité de conversion, une innovation est en cours avec le passage à l’échelle nanométrique, par des nanoparticules ou des nanofils de silicium. Les recherches se tournent vers la chimie pour étudier ces fils de silicium nanostructurés ou les polymères pi-conjugués servant de semi-conducteurs organiques.

Les nanofils de silicium pour cellules solaires, issues du secteur « chimie de l’état solide », correspondent à une approche complémentaire aux hétérojonctions silicium (interface entre un matériau de type donneur d’électrons et un matériau de type accepteur d’électrons de natures différentes (« gap » différents)). Ils renforcent les propriétés semi-conductrices connues de ce matériau et en font des candidats prometteurs pour de futurs dispositifs. L’intégration de nanofils de silicium dans les cellules solaires photovoltaïques permettrait d’augmenter leur rendement (taux de conversion de l’énergie lumineuse en énergie électrique) pour atteindre des niveaux supérieurs à 30 %, contre 20 % au mieux, actuellement.

Depuis plus de vingt ans, les chercheurs explorent la filière organique, celle utilisant des matériaux plastiques semi-conducteurs. Le polymère est étalé sur un substrat, donnant des cellules souples, ultraminces et légères, mais dont la durée de vie n’excède pas trois ans. Leurs structures peuvent être modifiées grâce à la chimie, modulant ainsi leurs propriétés optiques et électroniques.
Plusieurs approches sont à l’étude :

  • l’utilisation de composés organiques moléculaires, avec des techniques d’évaporation sous vide ;
  • l’emploi de polymères ou d’oligomères solubles, sous forme d’encres ;
  • le greffage de colorants organométalliques ou organiques sur des nanostructures inorganiques tels que les oxydes métalliques.

Tous ont un point commun : ils ont une structure électronique pi-conjuguée. Les polymères pi-conjugués sont utilisés en combinaison avec des dérivés fullerènes ou des nanocristaux inorganiques, possédant une absorbance limitée.


De la biomasse aux biocarburants

Cultures sous air enrichi en CO2 de la plate-forme biotechnologique HélioBiotec d’étude des biocarburants dits de 3e génération

Cultures sous air enrichi en CO2 de la plate-forme biotechnologique HélioBiotec d’étude des biocarburants dits de 3e génération. © G.Lesénéchal/CEA
Pour aller plus loin


La biomasse

AnimationLes biocarburants de 2e générationAfficher en plein écran
VidéoSerge – Technicien de laboratoire en biotechnologie





Ligne assemblage batteries Lithium-ions
Ligne assemblage batteries Lithium-ions
© P.Avavian/CEA

VidéoLaboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles (Liten)


Certaines microalgues et cyanobactéries produisent des molécules à forte teneur énergétique.

La photosynthèse permet de convertir la fantastique quantité d’énergie solaire reçue par la Terre en énergie chimique. En France, on estime que la biomasse utilisable à des fins énergétiques pourrait fournir 20 % de la consommation actuelle d’énergie primaire. Une première approche est la conversion des sucres et matières grasses en carburants (éthanol, diester, biodiesel, etc.) mais ceux-ci entrent en compétition avec les biomasses alimentaires. Fabriquer du carburant à partir de déchets verts ou de résidus forestiers, riches en lignocellulose, est une alternative à ces « agrocarburants », notamment en France qui possède la 3e forêt d’Europe occidentale. Mais leur transformation représente un défi technique. Plusieurs étapes sont nécessaires pour convertir la biomasse (paille, résidus forestiers…) en biocarburants de 2e génération.

Après séchage et broyage, la biomasse est décomposée grâce à un prétraitement thermique (par pyrolyse ou torréfaction, à environ 600 °C, en l’absence de dioxygène). Puis la gazéification du carbone est effectuée, en présence de vapeur d’eau ; le carbone est oxydé et converti en monoxyde de carbone puis en dioxyde de carbone. Ces produits sont portés à 1 200 - 1 400 °C, provoquant le « craquage » des molécules. Différentes technologies permettent d’éliminer certains résidus (soufre, azote, etc.) et de ne conserver qu’un mélange gazeux de dihydrogène (H2) et de monoxyde de carbone (CO). L’ajout d’hydrogène permet de multiplier par deux le rendement énergétique du procédé et de capter tout le monoxyde de carbone contenu dans la biomasse. A l’issue de ces étapes de synthèse et de raffinage, grâce par exemple au procédé Fischer-Tropsch, différents sous-produits sont disponibles : du diesel pour les véhicules, du jet fuel pour les avions et du naphta pour la chimie verte (cosmétiques, plastiques…).

Le CEA investit également dans les procédés de troisième génération, comme la production de micro-organismes en bioréacteurs ou la chimie bio-inspirée. Dans le premier cas, l’enjeu est d’accroître le potentiel de production de lipides, de dihydrogène ou de précurseurs de molécules énergétiques par amélioration des voies métaboliques. Dans le second cas, qui nous intéresse ici, il s’agit d’exploiter les connaissances accumulées sur les structures et mécanismes des enzymes (catalyseurs biologiques) qui assurent la photosynthèse et de la production de dihydrogène pour concevoir des molécules organiques plus petites et plus compatibles avec les matériaux envisagés pour les biopiles. Cette approche « bioinspirée » a pour principal avantage de fonctionner en conditions douces de température et de pression, et d’utiliser des métaux usuels de la biocatalyse (zinc, cobalt ou fer) plutôt que des métaux précieux comme le platine.

Les batteries lithium-ion

L’activité de R&D dédiée au stockage de l’énergie par voie électrochimique concerne surtout les marchés du solaire photovoltaïque, du transport (automobile, camion, véhicules légers…) et de l’électronique nomade, qui nécessitent des solutions performantes. Pour le solaire, énergie intermittente, la solution est de coupler les panneaux solaires avec des batteries. Dans le cas du transport électrique, il faut embarquer une forte quantité d’énergie par kilogramme grâce aux batteries, pour assurer l’autonomie des véhicules. Enfin, les objets communicants autonomes nécessitent des micro et mini-sources d’énergie. Un point commun à tous ces domaines est la technologie Lithium qui peut s’adapter à chacune des applications. On distingue lithium métal où l’électrode négative est composée de lithium métallique et lithium ion où le lithium reste à l’état ionique.

La batterie lithium-ion occupe aujourd’hui une place prédominante sur le marché de l’électronique portable et est en voie de remplacer la batterie au plomb ou au nickel. De tous les systèmes de stockage, elle apporte les meilleures performances. Son principe met en jeu le phénomène d’insertion électrochimique réversible de l’ion lithium dans des matériaux à potentiels différents : à l’électrode positive, un oxyde mixte à base de 90 % de cobalt, à l’électrode négative, du carbone graphite.

D’autres électrodes sont également étudiées, notamment celles à base de phosphate de fer, de silicium nano-structuré en remplacement du graphite (pour les véhicules électriques), ou d’oxyde de titane (pour les véhicules hybrides).

D’autres recherches sont en cours sur le lithium sous différentes formes : le lithium-ion polymère (encore très chère, cette version peut être très fine et prendre toutes les formes), le lithium-phosphate (qui possède une sécurité améliorée pour un coût plus faible car sans métaux rares type cobalt), le lithium-air (pour une puissance accrue).

Le CEA a mis en place la plate-forme technologique de prototypage de batteries pour les véhicules électriques. Elle permet la réalisation de batteries en petites séries, depuis la synthèse des matériaux jusqu’au montage dans un véhicule de façon pré-industrielle. Cette plate-forme ouverte de près de 6 000 m2, unique en Europe, dotée de salles anhydres pour l’élaboration des éléments du cœur de batteries et de laboratoires de test permet de réaliser des batteries à façon pour des applications de niche ou des prototypes de démonstration, voire de pré-production.