Les innovations dans les technologies des énergies

Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, la France doit réduire sa consommation d’énergie de 40 %, grâce à des efforts conjugués de sobriété, d’efficacité énergétique, et d’électrification des usages. Elle doit aussi passer de 25 % d’électricité à plus de 60 % dans son mix énergétique, avec l’objectif qu’elle soit le plus bas carbone possible. Une triple ambition à laquelle le CEA contribue en s’appuyant sur une vision intégrée de l’énergie.

Car pour être au rendez-vous, il faut agir simultanément sur trois fronts. La production d’électricité, tout d’abord, en augmentant la part d’énergies renouvelables (solaire, éolien sur terre et en mer, biomasse, biogaz, hydraulique…) et en renforçant l’usage de l’énergie nucléaire (prolongation des réacteurs en activité, développement de nouveaux réacteurs nucléaires…). La flexibilité et le couplage des énergies, ensuite : pour mieux intégrer dans le système les énergies renouvelables, intermittentes par nature, il faut renforcer tous les moyens de stockage de l’électricité (barrages réversibles, batteries stationnaires, batteries de véhicules électriques, hydrogène, chaleur…) ; il faut aussi disposer d’une architecture de réseaux intelligents qui s’adaptent en permanence à la production et à la demande d’énergie. Enfin, pour éviter la dépendance aux matières premières indispensables à toutes les futures technologies, il faut développer l’économie circulaire des matières. Autant de domaines sur lesquels le CEA mène des recherches et développe des solutions technologiques.

Énergies

Des avancées majeures dans le développement de petits réacteurs nucléaires

Parce que les futurs petits réacteurs modulaires (SMR – small modular reactor) sont un atout crucial pour atteindre la neutralité carbone en 2050, le CEA y contribue via plusieurs projets d’envergure. Une avancée majeure en 2022 concerne le projet NUWARD™ - consortium qui rassemble EDF, TechnicAtome, Naval Group, Framatome, Tractebel et le CEA - et son nouveau générateur de vapeur, basé sur le principe des échangeurs à plaques, au lieu des traditionnels tubes en U à recirculation. Cette technologie met en œuvre des mini‑canaux côté secondaire, dont il faut s’assurer qu’ils ne s’obstruent pas. C’est pour étudier l’encrassement de ces canaux, que le CEA a inauguré en mars 2022 sa boucle BEENCH. La construction de cette installation avait été lancée en 2021 sur la plateforme expérimentale POSEIDON à Cadarache.
Par ailleurs, les codes de simulation du CEA pour étudier des situations d’accidents au cœur du réacteur ont, une nouvelle fois, démontré leur efficacité en 2022. Pour la première fois, un calcul couplant neutronique et thermohydraulique a été réalisé avec des codes de dernière génération : APOLLO3® pour la neutronique et FLICA5 pour la thermohydraulique cœur. Il portait sur la simulation d’un transitoire accidentel d’insertion d’eau froide, dans une configuration représentative du cœur d’un SMR sans bore soluble. Il ouvre la voie à un traitement de plus en plus précis des situations accidentelles sur les réacteurs nucléaires à crayons.

Petits réacteurs nucléaires
Réseaux

Modéliser et simuler les réseaux énergétiques avec TRILOGY

Avec différentes sources d’énergie et différents besoins, les réseaux d’énergie du futur se devront d’être modulables et intelligents. Pour modéliser et optimiser les différentes architectures de systèmes multi-énergies à toutes les échelles géographiques et temporelles, le CEA a développé la plateforme TRILOGY. De quoi guider le choix des futurs systèmes énergétiques et préparer leur pilotage. Un premier cas d’étude a été choisi : TRILOGY s’attelle à la modélisation du quartier Cambridge à Grenoble, avec ces réseaux électriques, et thermiques.

Tokamak JT-60SA
Fusion

Fusion nucléaire : le CEA copilote du tokamak JT-60SA

Conçu, financé et construit par l'Europe et le Japon dans le cadre de l’approche élargie d’ITER, le tokamak JT‑60SA permettra de faire la démonstration de la fusion par confinement magnétique comme nouvelle source d’énergie à grande échelle. JT‑60SA permettra d’étudier des modes avancés de confinement magnétique et leur stabilité, de manière complémentaires d’ITER. Ce tokamak est l’une des plus grandes machines expérimentales sur le point de démarrer. Son programme scientifique va être copiloté par trois responsables d’expériences dont un Européen, Jeronimo Garcia de l’Institut de recherche sur la fusion magnétique (IRFM) du CEA.

Partenariat

Le CEA et GRDF s’associent pour la production et la distribution de biogaz

Développer des solutions innovantes pour optimiser la production et la distribution de gaz renouvelables, tel est l’enjeu du partenariat de R&D signé en avril 2022 entre le CEA et GRDF, principal distributeur de gaz en France. Durant cinq ans, les chercheurs du CEA viendront en appui de GRDF pour relever ce défi de transition écologique, mais aussi repenser et adapter le réseau de gaz à une distribution de plus en plus décentralisée.

Plateforme de batteries
Plateforme

Une toute nouvelle plateforme de batteries en Nouvelle-Aquitaine

Pour accélérer le développement des futures générations de batteries, le CEA a lancé en 2022 une plateforme de 350 m² dédiée aux matériaux. Installée à Pessac, elle est dotée d’outils d’ingénierie conçus pour travailler sur des composés sensibles à l’air, comme le lithium. Objectif ? Améliorer la sécurité, la longévité, et la densité d’énergie et de puissance des futurs accumulateurs, mais aussi trouver des solutions pour remplacer des matériaux critiques car toxiques ou difficiles à sourcer. Cette plateforme complète l'expertise et les moyens significatifs dont dispose déjà le CEA.

Les innovations pour la sobriété énergétique

Réussir la transition énergétique implique de relever un enjeu majeur, à moyen comme à long terme : celui des ressources. Pour éviter de passer d’une dépendance aux énergies fossiles à une dépendance aux matériaux et terres rares, dont la France ne dispose pas, la sobriété s’impose.

Dans le nucléaire, pour économiser l’uranium naturel, notre pays a opté pour le mono-recyclage du plutonium et entend renouer, dès 2023, avec le mono-recyclage de l’uranium de retraitement. Des travaux sont par ailleurs en cours, avec l’aide du CEA, pour développer le multi-recyclage du plutonium dans les réacteurs à eau sous pression (REP) et des réacteurs EPR2. Ces trois procédés pourront faire économiser plus de 30 % d’uranium naturel. À plus long terme, l’objectif est de s’en passer totalement, en fermant le cycle du combustible dans les réacteurs à neutrons rapides (RNR) et en utilisant de l’uranium appauvri, que la France dispose en quantités suffisantes pour plusieurs centaines d’années. Le CEA explore toutes ces technologies en tenant compte de leur soutenabilité. Il met au point les procédés de traitement et de fabrication de ces nouveaux combustibles. Et il contribue aux études de scénarios qui permettent de calculer les flux de matière.

Les technologies de la transition énergétique vont, elles aussi, faire appel à une grande quantité de matières premières. Pour les batteries, citons le lithium, le nickel, le manganèse, ou encore le cobalt. Pour l’hydrogène : platinoïdes, nickel, et d’autres terres rares. Les moteurs électriques, eux, auront besoin d’aimants à base de terres rares, tandis que le solaire utilise du silicium et de l’argent. Afin d’économiser ces ressources critiques et régulièrement en tension, le CEA travaille à la fois sur leur diversification et leur substitution, sur des technologies plus frugales, sur des solutions d’économie circulaire et sur les usages. En novembre 2022, il a cofondé l’Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles (Ofremi) qui réalisera une veille stratégique économique et technique des chaines mondiales d’approvisionnement et des besoins, afin de produire des analyses de risques.

Recyclage

De nouveaux scénarios industriels de multi-recyclage du plutonium

La France a fait le choix stratégique d’extraire l’uranium et le plutonium du combustible usé pour les recycler dans de nouveaux assemblages de combustible, tels que le MOX (mélange d’oxydes uranium appauvri et plutonium). Dans ce cadre, le CEA a étudié en 2022 plusieurs scénarios industriels de multi-recyclage du plutonium dans le cadre du programme français quadripartite MRREP (multi-recyclage en REP). Ces scénarios, bâtis avec EDF, Framatome et Orano, tiennent compte à la fois de l’évolution du parc électronucléaire français et des hypothèses de la Politique Pluriannuelle de l’Énergie (PPE). Les premiers scénarios, qui considèrent un cycle en parc à 100 % de REP avec multi-recyclage en REP, mettent en jeu différentes gestions des matières dans les réacteurs EPR de prochaine génération (EPR2) : UOX (oxydes d’uranium), URE (uranium de retraitement enrichi), MOX et MIX (MOX à uranium enrichi).

Technologie

Un projet pour développer l’impression 3D dans le nucléaire

Destiné à déployer la fabrication additive (ou impression 3D) dans le secteur de l’énergie nucléaire, le projet ARQANE, lauréat du plan France Relance, a été officiellement lancé le 7 avril 2022 dans les locaux d’EDF Lab, à Paris-Saclay. Avec près de 40 % du budget total, soit quatre millions d’euros et une aide de Bpifrance d’un montant de 1,6 million d’euros, le CEA est un acteur majeur de ce projet, qui implique également EDF, TechnicAtome, Naval Group, Inovsys, THF, Orano, Framatome et l’Institut de soudure. ARQANE interviendra sur les procédés, leur qualification et leur codification, mais aussi sur les moyens de contrôle non destructif et l’étude des pièces sous irradiation aux ions.

impression 3D
Vitrification des déchets de Fukushima
Démantèlement

Vitrification des déchets de Fukushima : des campagnes d’essais concluantes

Impliqué dans plusieurs projets du vaste chantier d’assainissement et de démantèlement de la centrale de Fukushima, le CEA aide le Japon à conditionner les déchets issus du traitement des eaux de refroidissement des réacteurs accidentés en mars 2011. Quatre campagnes d’essais avaient été lancées en 2021, à l’aide du prototype industriel de vitrification DEM&MELT basé à Marcoule, et développé par le CEA en collaboration avec Orano et Anadec. Elles se sont achevées avec succès en février 2022, tous les conteneurs produits pour conditionner des répliques de ces déchets répondant aux critères de qualité visés. Le procédé DEM&MELT a reçu le grand prix 2022 de la Société française d'énergie nucléaire.

Brevet

Un nouveau procédé breveté pour fabriquer un monomère biosourcé

Indispensable pour produire certains polyesters et résines de synthèses comme l’époxy, le monomère anhydride succinique pourra désormais être biosourcé, grâce à un procédé que le CEA a fait breveter en 2022, dans le cadre d’un partenariat avec le Collège de France. Ce procédé, dit de carbonylation, permet de le synthétiser à partir de monoxyde de carbone (CO), lui-même issu de l’électro-réduction du CO2.

Relier technologie et économie pour la sobriété énergétique

Atteindre la neutralité en carbone d’ici à 2050 nécessite de lever de nombreux verrous technologiques, sur lesquels travaille le CEA. Mais cela ne suffira pas. Pour réussir cet objectif, il faut aussi que les chemins empruntés soient économiquement soutenables, tant en termes de coût que d'accès aux ressources nécessaires. C’est pour éclairer ces trajectoires que l’Institut de technico-économie des systèmes énergétiques (I‑Tésé) du CEA mène des études avec une vision systémique s'appuyant sur les expertises du CEA. Ses travaux portent sur les technologies bas-carbone de production et de stockage d'énergie, les ressources nécessaires pour mettre en œuvre ces technologies, ainsi que sur la pertinence des cadres règlementaires et des modèles de marché. Depuis 2022, I‑Tésé a élargi son champ de recherche aux sciences humaines et sociales pour s'intéresser notamment aux évolutions de la demande et des modes de consommation de l'énergie.

Le premier observatoire de la sobriété énergétique
Plateforme

Le premier observatoire de la sobriété énergétique

Sur quelles stratégies les Français ont-ils misé pour faire face à la crise énergétique actuelle ? Jusqu’à quel point pourront-ils réduire leur consommation ? Et le feront-ils dans la durée pour préserver la planète ? Pour répondre à ces questions et pouvoir orienter les politiques publiques, le CEA a lancé fin 2022 l’observatoire PROMETHEE. Multidisciplinaire, cet observatoire conjugue l’expertise en économie, sciences sociales et recherche participative de ces cinq cofondateurs : l’Institut I‑Tésé du CEA, l'Université de Caen, Mines Paris‑PSL, le Dôme de Caen et l'IRTS Normandie-Caen.

Analyse

Une grille pour estimer les coûts de production de l’hydrogène décarboné

La France compte doubler sa production d’hydrogène décarboné d’ici à 2030. Mais à quel coût ? Pour chiffrer au mieux les différents scénarios possibles, le CEA a mis au point une grille d’analyse où chacun pourra intégrer ses propres hypothèses. L’article, paru dans la Revue de l’énergie en juillet 2022, présente les différentes filières de production possibles et propose des estimations de coûts, sur la base d’une synthèse de la littérature récente.

Une grille pour estimer les coûts de production de l’hydrogène décarboné
Analyse

Une base de données sur les technologies de l’énergie

Le CEA produit chaque jour une multitude de données sur le coût, le rendement et les caractéristiques des technologies de l’énergie actuelles et futures. Pour leur donner du sens et les exploiter plus facilement, ces données ont été consolidées en 2022 au sein d’une base unique, qui a permis de développer des modèles de représentation du système électrique européen jusqu’en 2050. Objectifs : éclairer les chercheurs dans leurs travaux et guider les feuilles de route du CEA.