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La méthanisation : un nouveau procédé allié dans la biodégradation de la chlordécone


​​Les chercheurs de l’UMR Génomique Métabolique (Genoscope/CEA-Jacob) et leurs collègues de l’Université de Lorraine publient une étude dans le journal Science of The Total Environment démontrant le rôle de la méthanisation en conditions de haute température dans la biodégradation de la chlordécone, insecticide organochloré connu pour sa toxicité et persistance dans l’environnement, en particulier aux Antilles Françaises. Les résultats présentés ouvrent ainsi la voie au traitement par méthanisation de déchets agricoles contaminés à la chlordécone. En permettant une valorisation énergétique de ces déchets via la production de biogaz, ce procédé industriel se positionne comme une stratégie d’intérêt aux Antilles Françaises en contribuant d’une part à la dépollution de la chlordécone et d’autre part à l’autonomie énergétique de ces territoires insulaires.​​

Publié le 30 août 2023

La méthanisation est une technique basée sur la capacité de certains micro-organismes à dégrader de la matière organique, en conditions contrôlées et en l'absence d'oxygène. Ce processus à l'échelle industrielle permet la production de biogaz enrichi en méthane pouvant être utilisé pour produire de l'électricité après cogénération ou injection dans le réseau de gaz après épuration. Le digestat, issu de la digestion de la matière organique permet une production d'engrais.

Une application sanitaire : la dégradation de la chlordécone

Des chercheurs de l'UMR Génomique Métabolique (Genoscope/CEA-Jacob), de l'ENSAIA et de l'Unité de Recherche AFPA de l'Université de Lorraine viennent de montrer que de telles conditions, extrêmement réductrices, permettaient également de dégrader la chlordécone.

La chlordécone, insecticide organochloré, a été massivement utilisée pour lutter contre le charançon du bananier dans les Antilles Françaises de 1972 à 1993. Sa structure particulière rend cette molécule très stable et difficile à dégrader, conduisant à une pollution à long terme de l'environnement et d'une partie de la chaîne alimentaire dans ces territoires.

Dans l'étude publiée dans le journal Science of The Total Environment, les chercheurs, après avoir vérifié que la chlordécone n'avait pas d'effet inhibiteur sur la production de méthane par les micro-organismes, ont mis au point un protocole de dosage de la chlordécone et de ses produits de transformation. Ils ont ensuite testé deux conditions de méthanisation à l'aide de digestats issus de méthaniseurs fonctionnant à l'aide de déchets végétaux et animaux. Les analyses chimiques ont montré une diminution de la concentration de la chlordécone particulièrement importante en conditions thermophiles, c'est-à-dire à plus haute température (55°C contre seulement 37°C en condition mésophile/modérée). L'apparition au cours du temps de plusieurs produits de transformation a confirmé la dégradation de la chlordécone en écartant l'hypothèse d'une fixation de la chlordécone sur la matière organique du digestat.








Schéma représentant le protocole expérimental utilisé dans l'étude / Crédit : Perla Alnajjar Univ. de Lorraine



Ces résultats ouvrent la voie à une utilisation possible du processus de méthanisation pour le traitement des déchets contaminés à la chlordécone, tout en maintenant l'axe de valorisation énergétique de ce procédé. Ceci représenterait une stratégie extrêmement pertinente de bioremédiation de la chlordécone aux Antilles Françaises, territoires insulaires particulièrement touchés par la pollution par cet insecticide. Il reste cependant encore plusieurs étapes à franchir avant le transfert technologique final. 


Contacts :

CEA : Pierre-Loïc Saaidi (Génomique Métabolique, Genoscope, Institut François Jacob, CEA, CNRS, Univ Evry, Université Paris-Saclay) | plsaaidi@genoscope.cns.fr 

Université de Lorraine : Yves Le Roux (Université de Lorraine, INRAE, UR AFPA, ENSAIA, Chaire Industrielle Agrométha) | yves.leroux@univ-lorraine.fr

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