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Observer en direct la dégradation d’une batterie en surcharge, c’est possible


En couplant diffraction des rayons X et diffusion aux petits angles à l'ESRF, analyse électrochimique et détection de gaz, des chercheurs du CEA ont pu suivre en direct la dégradation d'une batterie Li-ion en surcharge. Cette avancée ouvre de vastes perspectives : préciser la plage de fonctionnement optimale, affiner les modèles de vieillissement, améliorer les contrôles qualité post-fabrication, etc. 

Publié le 2 septembre 2025

​Les travaux de l'équipe grenobloise, menés dans le cadre du European Battery Hub, ont été publiés dans Advanced Energy Materials, une revue à facteur d'impact élevé : ils apportent un éclairage inédit sur un sujet environné de mystère. En effet, l'étude de batteries en surcharge se base aujourd'hui sur des analyses post mortem, ou à des stades successifs de dégradation. La cinétique exacte du phénomène reste inconnue.

Une expérience sur plusieurs heures

Pour accéder à ces cinétiques réactionnelles, l'expérience a été conduite au Synchrotron sur une batterie en mode operando, sur des cycles de charge et décharge de plusieurs heures suivis d'une phase de surcharge, en couplant plusieurs techniques. Deux techniques RX, la diffraction et la diffusion aux petits angles, pour scruter l'évolution structurale des matériaux d'électrode. La détection de gaz, en particulier d'oxygène, pour détecter les changements irréversibles des structures. Enfin, l'analyse électrochimique, pour observer le fonctionnement de la batterie.


Mapping Reaction Mechanism During Overcharge of a LiNiO2/Graphite–Silicon Lithium‐Ion Battery: A Correlative Operando Approach by Simultaneous Gas Analysis and Synchrotron Scattering Techniques
« Corréler toutes ces modalités est une première, souligne Sandrine Lyonnard, spécialiste au CEA-Irig des études operando au Synchrotron. Tous les signaux doivent être synchronisés et les appareils de mesure, bien fonctionner ensemble. Cela implique de coordonner une équipe interdisciplinaire d'ingénieurs, d'électrochimistes et de physiciens. » 

Cartographier la batterie sans l'endommager

Il fallait aussi pouvoir « scanner » la batterie avec un tout petit faisceau pour sonder les hétérogénéités locales, et s'assurer que les rayons X n'endommagent pas le système au fil de l'expérience. Les mesures ont donc été faites en balayage rapide, sans arrêt sur un point particulier (« flying mode »). Une zone de contrôle très peu irradiée servait de référence pour prouver l'absence de détérioration liée aux conditions d'imagerie.

« Nous avons observé une batterie Li-ion 3,7 V à haute densité d'énergie, de chimie proche de celles des véhicules électriques, précise Lise Daniel, ingénieur chercheur au CEA-Liten et spécialiste des mécanismes de dégradation. L'amorce des changements irréversibles du matériau d'électrode était signalée par des émissions gazeuses de l'ordre de la ppm. »

Des dégradations croisées entre cathode et anode

L'équipe a collecté une foule d'informations inédites. Par exemple, elle a découvert l'existence de réactions croisées entre cathode et anode : les émissions gazeuses de la première interagissent avec la seconde, qui se met à son tour à produire des gaz.

Autre constat, les bulles de gaz peuvent isoler localement les matériaux d'électrode et ralentir la lithiation. Ceci, en particulier, dans les zones à défauts : manque de matière, présence de pollutions ou de surépaisseurs dues au procédé de fabrication… « Autant d'indications pour améliorer les contrôles qualité en usine », commente Lise Daniel.

« Ces expériences complexes au Synchrotron repoussent les limites de la caractérisation : nous sommes désormais capables de sonder une batterie avec des résolutions spatiotemporelles extrêmes, concluent les chercheuses. Ceci ouvre tout un champ de travaux pour le diagnostic rapide hyper résolu, avec des retombées pour les industriels du secteur. » 


Ref : Advanced Energy Materials, Volume: 15, Issue: 15, First published: 20 December 2024, DOI: (10.1002/aenm.202404080) ​

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