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Les primates pensent-ils tous pareil au repos ?


Le cerveau des humains se distingue-t-il de celui des autres primates par des différences organisationnelles ? Ces différences pourraient-t-elles expliquer certaines capacités cognitives exceptionnelles des humains ? Dans un article publié dans Cell Reports, une équipe internationale, parmi laquelle des chercheurs de MIRCen (CEA-Jacob), démontre qu'un réseau cérébral associé à des capacités cognitives très élaborées chez les humains n'existe pas à l'identique chez les primates non-humains.

Publié le 13 avril 2022

Le cerveau humain est organisé en réseaux fonctionnels : différentes régions cérébrales communiquent entre elles via des voies privilégiées pour assurer des fonctions particulières (analyser des informations, contrôler nos mouvements,…). Bien que ce fonctionnement se retrouve chez tous les primates, l'humain se distingue par certaines capacités cognitives qui lui sont propres, comme une forte aptitude à la pensée abstraite. Un des réseaux les plus énigmatiques du cerveau est le "réseau du mode par défaut". Identifié chez les humains, ce réseau est actif uniquement lorsqu'un sujet est au repos, sans mouvement ou sans action cognitive particulière. Il est associé à l'introspection, à la pensée autodirigée, et à la planification du futur.

Ce réseau du mode par défaut existe-t-il également chez les autres primates ? 

Des chercheurs du Laboratoire des Maladies Neurodégénératives (CNRS/CEA/Université Paris-Saclay) de MIRCen, en collaboration avec des laboratoires français1, canadien et américain, ont caractérisé les réseaux cérébraux de quatre espèces de primates en IRM fonctionnel (IRMf) : l'humain, le macaque, le ouistiti et le plus petit primate du monde, le microcèbe murin. Cette étude a été initiée suite à la découverte des réseaux cérébraux du microcèbe par une équipe Française. A cette occasion, les chercheurs de MIRCen avaient mis au point la méthodologie d'analyse complexe d'images obtenues par IRMf qui a été adaptée pour explorer le cerveau des deux autres espèces de primates non humains et des humains.

Les résultats publiés dans Cell Reports montrent que le réseau du mode par défaut identifié chez les humains n'est pas retrouvé à l'identique chez les primates non humains étudiés. En effet, chez les humains au repos, ce réseau est caractérisé par des connexions entre des régions spécifiques du cerveau, dont le cortex préfrontal médian, chargé de la manipulation de l'information, et le cortex cingulaire postérieur, impliqué dans la régulation des interactions entre régions cérébrales.

Chez les trois primates non humains de cette étude, certaines des connections caractéristiques du réseau du mode par défaut des humains n'étaient pas présentes, et le cortex préfrontal médian et le cortex cingulaire postérieur étaient faiblement connectés.

Ces résultats laissent supposer que le cortex préfrontal médian et le cortex cingulaire postérieur n'ont été associés que récemment dans l'évolution des primates, menant à un remodelage du réseau du mode par défaut chez les humains. Ce remodelage aurait facilité la capacité de pensée abstraite qui a conduit à l'augmentation des capacités cognitives humaines.

En effet, le cortex préfrontal médian a un rôle important dans des processus cognitifs comme la manipulation flexible de l'information, l'élaboration de stratégies pour des prises de décisions non-impulsives, la régulation des émotions, la motivation, et la sociabilité. L'activité du cortex cingulaire postérieur est importante pour engager les processus cognitifs vers de la cognition interne et pour réguler le niveau d'attention vers une tâche. 

1 - Institut des Sciences cognitives Marc Jeannerod (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1


Arbre évolutif du réseau du mode par défaut dans quatre espèces de primates.© Clement Garin

 

Cette étude a fait l'objet d'un communiqué de presse CNRS
Contact chercheur : Marc Dhenain | marc.dhenain@cea.fr

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