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Première mesure fine du « brouillard cosmique » dans l’Univers proche


Des chercheurs du Laboratoire Leprince-Ringuet (CNRS/École Polytechnique) ont effectué la première mesure de l’intensité de la lumière extragalactique diffuse dans l'Univers proche, véritable brouillard de photons dans lequel baigne l'Univers depuis sa formation. ​

Publié le 16 janvier 2013

​Utilisant des sources gamma parmi les plus brillantes de l'hémisphère sud, cette évaluation a été conduite à partir de mesures effectuées par le réseau de télescopes HESS [1], installé en Namibie, auxquels contribuent le CNRS et le CEA. Elle est complémentaire de celle réalisée récemment par l’observatoire spatial Fermi-LAT [2]. Ces résultats apportent des éléments nouveaux pour appréhender la taille de l'Univers observable en rayons gamma et pour mieux comprendre la formation des étoiles et l’évolution des galaxies dans l’Univers. Ils sont publiés le 16 janvier 2013 sur le site de la revue Astronomy & Astrophysics dont ils font la couverture.

La lumière émise par tous les objets de l'Univers (étoiles, galaxies...) depuis sa naissance emplit l'espace intergalactique d'un « océan » de photons appelé « lumière extragalactique diffuse ». La luminosité ambiante de notre galaxie empêche de mesurer directement cette trace fossile de l'activité lumineuse de l'Univers. Pour contourner ce problème, les astrophysiciens s’appuient sur le rayonnement gamma [3] (d’une énergie plus de 500 milliards de fois plus importante que celle de la lumière visible), qui offre une méthode alternative et indirecte pour sonder cette lumière.

En effet, un faisceau de rayons gamma issu d'une galaxie lointaine, à plusieurs centaines de millions d'années-lumière, est atténué lors de son voyage vers la Terre, du fait d’interactions avec la lumière diffuse. Plus précisément, au « contact » d’un photon diffus, un photon gamma peut « disparaître » en donnant naissance à un électron et à son anti-particule, un positron, ce qui a pour effet d’atténuer l’intensité du faisceau. Plus le brouillard de photons diffus est épais, plus l'atténuation est importante, réduisant la taille de l'Univers observable en rayons gamma. Finalement, l’absorption par l'atmosphère de la Terre des rayons restants engendre une cascade de particules subatomiques, qui génère un éclair lumineux détectable depuis le sol par HESS, un réseau de télescopes majoritairement franco-allemand. Il repère les rayons gamma de très haute énergie (de l’ordre d’un million de millions d’eV), tandis que ceux de plus basse énergie sont détectés directement par le Large Area Telescope (LAT) de l’observatoire spatial Fermi Gamma-Ray Space Telescope.

Dans cette étude, les chercheurs se sont intéressés à des galaxies particulières appelées blazars [4] distantes de plusieurs milliards d'années-lumière. En mesurant avec HESS les spectres en rayons gamma émis par des blazars relativement proches, ils ont évalué l’effet de l’interaction des rayons gamma très énergétiques avec la lumière extragalactique diffuse dans une sphère d’un rayon de 3 milliards d'années-lumière. La collaboration Fermi-LAT a fait de même dans l’Univers plus lointain, entre 5 et 10 milliards d'années-lumière. Ces mesures ont permis d’en déduire, pour la première fois avec une précision de l'ordre de 20 %, l’intensité de la lumière stellaire contenue dans l’Univers, dans la gamme des longueurs d'onde allant du proche infra-rouge à l'ultra-violet, en passant par le visible.

Une meilleure connaissance de cette lumière diffuse, véritable « mémoire » de l’Univers lumineux, nous révèle des informations sur les premières étoiles. Elle permet ainsi de mieux comprendre leur formation ainsi que l’évolution des galaxies. Cette nouvelle donnée pourrait être intégrée dans certains modèles cosmologiques pour mieux décrire la vitesse et les processus de formation des étoiles depuis la naissance de l’Univers. Ces résultats permettent également de définir la taille de l'Univers observable en rayons gamma et d’envisager l'étude de signatures de mécanismes plus fondamentaux, liés aux champs magnétiques intergalactiques ou bien de phénomènes de physique « exotique ».


Histoire cosmique et mesure de l’opacité aux rayons gamma à différentes époques par HESS et Fermi-LAT

Histoire-cosmique.jpg

Légende : L’axe vertical du graphique montre l’opacité normalisée à un modèle de référence (Franceschini et al., 2008) et l’axe horizontal indique les distances, en années lumière, auxquelles sont situés les blazars utilisés pour les mesures. Le point bleu à gauche indique la gamme dans laquelle la mesure de Fermi est statistiquement significative et le point rouge à droite montre la mesure réalisée par HESS dans l’Univers proche. © H.E.S.S. Collaboration


Les laboratoires français impliqués dans H.E.S.S.


  • Laboratoire « Astroparticule et cosmologie » (CNRS/Université Paris Diderot/CEA/Observatoire de Paris),

  • Centre d'études nucléaires de Bordeaux Gradignan (CNRS/Université Bordeaux 1),

  • Institut de planétologie et d'astrophysique de Grenoble (CNRS/Université Joseph Fourier),

  • Institut de recherche sur les lois fondamentales de l'Univers (CEA),

  • Laboratoire d'Annecy-le-Vieux de physique des particules (CNRS/Université de Savoie),

  • Laboratoire Leprince-Ringuet (CNRS/École polytechnique),

  • Laboratoire de physique nucléaire et de hautes énergies (CNRS/UPMC/Université Paris Diderot),

  • Laboratoire Univers et Particules de Montpellier (CNRS/Université de Montpellier 2),

  • Laboratoire « Univers et théories » (Observatoire de Paris/CNRS/Université Paris Diderot)

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