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Soigner avec les anticorps monoclonaux


En octobre 2020, le président Donald Trump, atteint par la Covid-19, recevait en urgence un traitement à base d’anticorps monoclonaux, popularisant cette stratégie thérapeutique alors peu connue du public.  Comment agissent les anticorps monoclonaux thérapeutiques et sur quelles pathologies ? Quels sont leurs atouts ? Explications.

Publié le 18 octobre 2022

C'est quoi un anticorps monoclonal thérapeutique ?

Les anticorps monoclonaux thérapeutiques sont des molécules produites en laboratoire pour traiter des maladies. Ils sont quasiment identiques aux anticorps naturellement fabriqués par notre système immunitaire pour lutter contre une agression biologique (virus, bactérie, champignon, cellule étrangère…). D’où leur efficacité.

Explications en vidéo

VidéoAnticorps monoclonaux

Un anticorps monoclonal produit en laboratoire fonctionne quasiment comme un anticorps naturellement fabriqué par l’homme : il reconnait spécifiquement un élément particulier de l’agresseur, appelé antigène (par exemple, une région d’une protéine de surface d’un virus), et va s’y attacher. Cette liaison anticorps-antigène va initier la destruction de l’agresseur ou l’empêcher de se reproduire.
La spécificité des traitements à base d’anticorps monoclonaux réside dans leur capacité à atteindre une cible (une protéine impliquée dans une maladie, un virus, etc.) avec une très grande précision, ce qui les classe parmi les outils les plus puissants de la médecine moderne

Les anticorps monoclonaux thérapeutiques existent depuis plus de trente ans. Mais c’est l’arrivée des anticorps dits « humanisés » (c'est-à-dire modifiés génétiquement pour ne pas être rejetés par l'organisme) à la fin des années 1990 qui a véritablement lancé leur usage. Si bien qu’aujourd’hui, plus de cent molécules sont commercialisées dans le monde, dont environ trente en France.
 
Des prix Nobel sur les anticorps monoclonaux

  • 1984 (médecine) : Niels K. Jerne, Georges J.F. Köhler et César Milstein, pour la découverte du principe de production des anticorps monoclonaux
  • 2018 (médecine) : James P. Allison et Tasuku Honjo, pour la découverte du traitement du cancer par des anticorps monoclonaux (immunothérapie)
  • 2018 (chimie) : Gregory P. Winter, pour l'invention de la technique du Phage display, qui permet de produire de nouveaux anticorps monoclonaux en utilisant des virus.

Quelles maladies soigner avec les anticorps monoclonaux ?

Les maladies inflammatoires chroniques, auto-immunes pour la plupart d’entre elles (maladie de Crohn, polyarthrite rhumatoïde, psoriasis, etc.), puis les greffes d’organes, ont, les premières, bénéficié des avancées sur les anticorps monoclonaux. Et depuis une dizaine d’années, ces nouvelles thérapies révolutionnent le domaine de l’oncologie.  Bien plus ciblées et tolérées que la chimiothérapie, elles ont en effet changé la prise en charge de certains cancers considérés comme incurables. 
Aujourd’hui, de nouvelles applications apparaissent, comme des anticorps antimigraineux, ou d’autres qui régulent le cholestérol. Avec la covid-19, c’est seulement la deuxième fois que des anticorps monoclonaux sont développées contre des maladies infectieuses.

Comment agit un anticorps monoclonal ? 

Selon la cible visée, un anticorps monoclonal thérapeutique peut agir selon différents modes  :

  • Bloquer un processus : en neutralisant des molécules telles qu’une protéine de surface d’un virus ou une protéine impliquée dans une maladie inflammatoire, il est possible de réduire, voire de bloquer le développement de la pathologie concernée
  • Détruire des cellules cibles : la liaison anticorps-antigène (exemple : un récepteur exprimé à la surface d’une cellule tumorale) peut aussi directement entraîner la destruction de la cellule
  • Stimuler une fonction biologique : les cellules cancéreuses expriment à leur surface des protéines empêchant le système immunitaire de les reconnaître (des immune check points). En ciblant et bloquant ces check points, des anticorps monoclonaux vont fortement réactiver la réponse immunitaire, conduisant à la destruction des tumeurs.
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Fonctionnement des anticorps monoclonaux © Les Défis du CEA / J. Perrodeau

Comment fabriquer un anticorps monoclonal ?

Un anticorps est une très grosse molécule, impossible à fabriquer par synthèse chimique comme pour les médicaments. L’idée est donc de le faire produire par un organisme vivant.

  • Sélection des anticorps, puis des gènes correspondants
  1. In vivo : des cellules sanguines d’animaux (en général de souris) sont confrontées à l’antigène et vont produire des anticorps. Le gène permettant la production du meilleur anticorps est ensuite extrait puis doit être « humanisé ». Des cellules sanguines de patients guéris peuvent aussi être utilisées. 
  2. Ou in vitro : des banques aléatoires de gènes d’anticorps sont créées artificiellement. Ces gènes sont « stockés » dans des organismes comme des levures ou des phages (variété de virus très simple). 

  • Production : le gène de l’anticorps monoclonal sélectionné est inséré dans des cellules de mammifères, choisies pour leur capacité à produire de grandes quantités d’anticorps. Ces mini-usines sont mises en culture dans un bioréacteur.
Génie génétique
 
Lorsqu'un anticorps monoclonal est produit chez la souris, il doit être au préalable « humanisé » en remplaçant certaines séquences ADN de souris par des séquences d’ADN humain. Ainsi modifié, l'anticorps, injecté au patient, ne sera pas considéré comme un corps étranger, et donc éliminé. 

Les travaux du CEA sur les anticorps monoclonaux

Plusieurs équipes développent des anticorps monoclonaux utilisés comme  outils de diagnostic des agents infectieux émergents et de la menace terroriste (NRBC). Ils travaillent aussi à l’élaboration d’anticorps monoclonaux thérapeutiques, notamment pour  lutter contre les maladies infectieuses (Covid-19, Ebola…). Trois start-up issues du CEA-Joliot se sont lancées dans le domaine : Skymab Biotherapeutics Deeptope  et Blue Bees Therapeutics.

Programme de recherche national

Les anticorps monoclonaux thérapeutiques font partie de la stratégie d’accélération « Biothérapies et bioproduction de thérapies innovantes » lancée par le gouvernement le 7 janvier 2022, dont l’objectif est de produire en France davantage de biomédicaments contre les cancers et les maladies chroniques et de créer les dispositifs médicaux de demain. Cette stratégie s’appuie sur un volet recherche appelé PEPR (programme et équipement prioritaire de recherche), piloté par l’ANR et confié à l’Inserm et au CEA.

Cet article est extrait des Défis du CEA n° 250

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Les anticorps monoclonaux © Les défis du CEA / J. Perrodeau


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