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Patrimoine : mettre en valeur notre héritage


​Le CEA tient une place spécifique dans le paysage national et international des recherches pour le patrimoine, mais également dans le domaine de la conservation-restauration des objets en matériaux organiques et inorganiques issus de fouilles archéologiques ou de collections historiques. Explications.

Publié le 12 septembre 2025

« De toutes les activités du CEA, celles liées au patrimoine pourraient sembler atypiques voire anecdotiques mais les sciences du patrimoine y ont, en réalité, « logiquement » toute leur place grâce aux compétences de ses équipes et à ses plateformes expérimentales uniques », comme le souligne Lucile Beck, responsable du Laboratoire de mesure du carbone 14 (LMC14) au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement (LSCE). Car, aux côtés des historiens, des archéologues ou des restaurateurs, les physiciens et les chimistes aussi contribuent à la compréhension, la préservation et la valorisation du patrimoine ancien, et le CEA y prend toute sa part.

Depuis des décennies, plusieurs de ses équipes développent et mettent en oeuvre un ensemble de techniques et de technologies innovantes, au service de l’art, de l’histoire et de l’archéologie. Leur contribution permet de documenter notre patrimoine, préserver les vestiges du passé mais aussi comprendre les processus d’altération des matériaux sur le très long terme.

Ainsi, « le LMC14, comme d’autres laboratoires du LSCE, sont en partie issus de la maîtrise des propriétés de la radioactivité naturelle et artificielle par le CEA qui, très tôt, l’a appliquée au développement de méthodes de datation basées sur la désintégration des noyaux », rappelle Lucile Beck. De même, à Grenoble, « c’est de l’intuition d’un jeune ingénieur que naît ARC-Nucléart en 1970 pour exploiter les propriétés du rayonnement gamma. Nous sommes aujourd’hui les seuls au monde à disposer d’un irradiateur gamma entièrement dédié au patrimoine et cela concourt à la notoriété du CEA », ajoute Karine Froment, ancienne directrice de l’atelier-laboratoire.

seul irradiateur gamma au monde dédié à la conservation du patrimoine,

Intérieur de la cellule d’irradiation d'ARC-Nucléart où sont positionnés les objets à désinfecter ou désinsectiser par irradiation gamma. Il s'agit du seul irradiateur gamma au monde dédié à la conservation du patrimoine. © A. Aubert/CEA


Et de même à Saclay où le CEA dispose de plateformes et de compétences technologiques uniques pour développer des approches analytiques originales sur les objets archéologiques.

 « La compréhension des mécanismes d’altération des objets archéologiques sert à conforter celle des matériaux destinés à isoler les déchets nucléaires à vie longue et haute activité en vue de leur stockage profond. Ici nous travaillons sur le temps long des matériaux et cela concerne à la fois le patrimoine et les missions clefs du CEA », complète Philippe Dillmann, responsable du Laboratoire archéomatériaux et prévision de l’altération (Lapa, UMR Nimbe CEA-CNRS).

Laboratoire archéomatériaux et prévision de l’altération  

Manipulation d’échantillons archéologiques au sein du Laboratoire archéomatériaux et prévision de l’altération (Lapa). © A. Aubert/CEA


Le CEA est un « lieu privilégié » où travaillent ensemble des spécialistes de différentes disciplines (physique, chimie, etc.) pour « l’analyse, la datation et la conservation », résument Lucile Beck et Karine Froment.

Pour l’analyse, direction le Lapa où on mène « des études physico-chimiques sur des matériaux anciens que ce soit pour des études d’altération, de provenance des objets ou même des savoir-faire anciens et de leur évolution », indique Philippe Dillmann.

La datation, c’est le métier du LMC14 qui, avec son spectromètre de masse par accélérateur, « produit des dates pour soutenir les projets de recherches liés à des problématiques historiques et archéologiques et, plus récemment, pour authentifier des œuvres d’art », explique Lucile Beck.

 


Enfin, c’est à ARC-Nucléart qu’une équipe pluridisciplinaire « composée d’ingénieurs en sciences nucléaires, de conservateurs et de restaurateurs, travaille à la préservation des œuvres et artefacts en matériaux organiques », poursuit Karine Froment. « Un lieu unique qui allie innovation et préservation de notre patrimoine », résume Stéphane David, son nouveau directeur.

Cette offre de services, qui bénéficie à l’ensemble de la communauté scientifique et patrimoniale française et européenne, ne va pas sans une activité de recherche soutenue.
« Nous faisons de la R&D pour améliorer nos outils de modélisation et nos traitements, pour élaborer des traitements plus verts, plus durables, que nous appliquons aussi à des bois modernes, par exemple pour renforcer leur résistance à l’humidité », témoigne ainsi Karine Froment.

Ces approches se nourrissent mutuellement, comme le montrent les travaux menés sur le chantier scientifique de Notre-Dame mais également les collaborations menées avec d’autres institutions françaises (CNRS, ministère de la Culture…) ou internationales comme l’AIEA. Elles permettent au CEA d’adopter une démarche globale : on n’analyse plus aujourd’hui un objet archéologique, une sculpture, un tableau ou un monument comme on le faisait auparavant et on restaure avec des techniques et une déontologie repensées pour restituer l’œuvre dans le respect de son contexte et de son histoire.

 datation par le carbone 14 

Laboratoire de mesure du carbone 14. Mise en place des cibles de graphite dans la source du spectromètre de masse par accélérateur ARTEMIS pour leur datation par la méthode du radiocarbone. © A. Aubert/CEA




VidéoCe que la Science révèle de Notre-Dame de Paris



Une collaboration emblématique entre ARC-Nucléart et l'AIEA

Depuis plus de vingt ans, ARC-Nucléart travaille avec l’AIEA sur les techniques d’irradiation gamma. Une coopération officialisée en 2023 par sa désignation comme « Centre collaborateur de l’AIEA pour l’utilisation des rayonnements ionisants pour la préservation du patrimoine », tout comme avant lui en 2021, le centre collaborateur « Atoms for Heritage » dont le Lapa et le LSCE font partie. Ces labels visent à renforcer la promotion de l’utilisation de techniques nucléaires pour la préservation du patrimoine, la diffusion des connaissances, la formation et la sensibilisation aux questions liées à la conservation du patrimoine.

« Les études pour le patrimoine sont aujourd’hui menées de manière holistique », confirme Philippe Dillmann. « Ce sont des systèmes anciens qui font l’objet de recherche et non plus des œuvres isolées, que ce soit pour la datation, l’altération ou la recherche de provenance. Les résultats des analyses physico-chimiques ne prennent de sens que replacés dans leur environnement physico-chimique mais aussi historique ». Des approches complémentaires qui font la force du CEA.


Mobilisation générale pour le patrimoine

D’autres laboratoires du CEA, à Saclay, Cadarache et Marcoule, mettent aussi, de façon plus ponctuelle, leurs savoir-faire au service du patrimoine. Par exemple, pour voir à travers des œuvres d’art sans jamais les toucher grâce à la microspectrométrie, pour analyser, avec un scanner à rayons X servant à caractériser les colis de déchets radioactifs, un fragment d’épée datant de l’âge du bronze ou encore pour aider à lever le voile sur certaines énigmes historiques comme les derniers jours de Napoléon à Sainte-Hélène par l'étude de protéines organiques.


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