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500e dose de DPA-714 produite au SHFJ et injectée à un patient : quand une molécule utile à la recherche fondamentale devient potentiellement un outil de diagnostic


​​​DPA-714, c’est le nom de code d’une molécule utilisée depuis plus de 10 ans chez l’Homme comme radiotraceur pour l’imagerie de l’inflammation du cerveau – la neuroinflammation. Au départ, jugée particulièrement intéressante pour aider à comprendre les mécanismes pathologiques de maladies qui touchent le cerveau, elle pourrait bientôt servir à diagnostiquer certaines épilepsies, et ainsi modifier la prise en charge thérapeutique de patients. C’est ce que des équipes du SHFJ ont révélé au travers de leurs derniers essais cliniques, après plus de dix années à défricher le terrain en menant des études de validation chez l’animal et désormais plus de 500 injections chez l’humain dans le cadre d’essais cliniques. ​

Publié le 22 janvier 2024

Comment les réactions inflammatoires se développent-elles dans le cerveau ? Comment sont-elles associées aux maladies neurologiques ? La neuroinflammation désigne le processus par lequel les cellulaires immunitaires du cerveau, notamment la microglie, s'activent en réaction à la souffrance neuronale. C'est un processus encore aujourd'hui très mal connu. On ne sait par exemple pas si la neuroinflammation est toxique ou protectrice pour le cerveau et le rôle qu'elle joue dans les processus neurodégénératifs ou psychiatriques. Toujours est-il que depuis 20 ans environ, on sait que la production de la protéine TSPO par les cellules de la microglie augmente fortement en cas de neuroinflammation. Ceci a conduit les chimistes à tenter de synthétiser des molécules capables d'interagir spécifiquement avec la protéine TSPO et de les marquer avec des radioisotopes à temps de vie court, de manière à les utiliser comme radiotraceurs pour imager la neuroinflammation.

DPA-714 est dérivé d'une telle molécule ligand de TSPO. Synthétisé et radiomarqué (au fluor-18) pour la première fois en 2008 par une équipe internationale impliquant le SHFJ [1], ce composé se fixe spécifiquement sur les cellules gliales lorsque celles-ci sont dans un mode inflammatoire.

Fort du résultat de plusieurs études précliniques menées chez le rongeur et le primate non humain, le SHFJ a procédé à sa première injection chez l'Homme de DPA-714 en mars 2012 [2]. Depuis, son utilisation a été largement plébiscitée en neurosciences cliniques : le DPA-714 permet en effet de mieux comprendre les mécanismes de pathologies cérébrales, comme la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson, l'épilepsie ou la sclérose en plaques, et aussi de tester certaines stratégies thérapeutiques. Ainsi, certains essais cliniques ont été lancés spécifiquement grâce aux études précliniques menées avec le DPA. C'est le cas d'essais cliniques visant à tester certains anticorps monoclonaux ou des interleukines comme traitement de la maladie d'Alzheimer.

Mais l'exemple le plus prometteur aujourd'hui se trouve dans la prise en charge de l'épilepsie. Dans une étude très récente [3], le SHFJ montre un bénéfice direct du DPA-714 pour localiser des foyers épileptogènes dans l'épilepsie pharmaco-résistante. Dans cette étude, les chercheurs ont réussi à localiser des foyers épileptogènes chez des patients pour qui les imageries utilisées classiquement, la TEP avec le radiotraceur FDG et l'IRM, ne permettaient pas d'y parvenir. Cette localisation fine a permis une prise en charge chirurgicale de ces patients.

Et d'autres portes semblent s'ouvrir. Le DPA serait prédictif de l'efficacité des thérapies cellulaires dans le trauma cérébral. Il pourrait également servir à classer/stratifier les patients psychiatriques en fonction de leur niveau de neuro-inflammation et à évaluer l'efficacité de certaines thérapies.

Près de 12 ans après la première injection de DPA-714 chez l'humain, ce sont désormais 500 personnes qui ont reçu une injection de DPA-714 produit par la radiopharmacie du SHFJ, dans le cadre d'un protocole de recherche strictement encadré par la loi Jardé qui définit les recherches impliquant la personne humaine (RIPH). Les dernières études menées au SHFJ font entrevoir un changement de statut pour cette molécule, avec peut-être au bout une autorisation de mise sur le marché.​

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