Vous êtes ici : Accueil > Actualités > AVC à la naissance : la croissance cérébrale dépend-elle du sexe ?

Résultat scientifique | Cerveau

Neuropédiatrie

Devenir adolescent après avoir eu un AVC à la naissance : la croissance cérébrale dépend-elle du sexe ?


​Une étude par IRM morphométrique de la croissance cérébrale après un AVC néonatal, publiée dans Frontiers in Neuroscience et dirigée par une équipe d'UNIACT (NeuroSpin), confirme la vulnérabilité spécifique du cerveau du bébé masculin après un AVC autour de la naissance.​

Publié le 18 avril 2025

La survenue d'un accident vasculaire cérébral ischémique artériel du nouveau-né (NAIS en anglais) nécessite un suivi à long terme car elle entraîne potentiellement des handicaps avec des déficiences cognitives qui peuvent se révéler tardivement, au moins jusqu'à la fin de l'adolescence.

L'intense plasticité du cerveau en développement est généralement considérée comme bénéfique, avec une récupération fonctionnelle réputée meilleure qu'en cas de lésion comparable chez l'adulte, mais les avantages spécifiques qu'elle confère en cas de lésions cérébrales aussi précoces qu'en période périnatale, ne sont pas encore clairs, notamment en raison de la difficulté d'obtenir un suivi longitudinal suffisant. De multiples facteurs de variabilité influencent la plasticité : l'âge de survenue, le volume de l'AVC, sa localisation à gauche ou à droite, la présence ou non d'une épilepsie, etc. sans compter les facteurs environnementaux et socio-économiques. Par ailleurs, les garçons sont deux fois plus touchés par l'AVC néonatal que les filles, mais on ne sait pas si leur évolution clinique et cognitive est différente à long terme.

La croissance du cerveau (dont le volume est multiplié par environ 4 entre la naissance et l'âge adulte) est une première approximation de la plasticité du cerveau immature. Jusqu'ici, les quelques études morphométriques de la croissance cérébrale après un AVC néonatal reposaient sur de petites cohortes avec une grande variabilité d'âge, de territoires et d'origines des lésions, et sans prendre en compte les différences liées au sexe.

Des chercheurs d'UNIACT, en collaboration avec plusieurs CHU français et le centre national de référence sur l'AVC de l'Enfant, ont mené une étude longitudinale à long terme (20 ans !) du développement du cerveau par IRM morphométrique chez les participants de la cohorte AVCnn (100 bébés nés entre 2003 et 2006), en comparaison à des sujets témoins appariés en âge et en sexe. Ils ont analysé les différences entre les garçons et les filles des trajectoires de croissance de la matière grise autour de la lésion (ipsilésionnel) ou dans l'hémisphère opposé (contralésionnel), tout en tenant compte des autres facteurs de variabilité. Les images ont été acquises à NeuroSpin à 7 ans, et à l'adolescence, à 16 ans.

L'étude publiée dans Frontiers in Neuroscience montre que :

  •  A 7 et à 16 ans, les volumes des hémisphères sont réduits chez les patients par rapport aux témoins. Le volume de matière grise est diminué de 16 % chez les garçons, et de 10 % chez les filles.
  • dans l'hémisphère ipsilésionnel, les pertes de volume de la matière grise corticale et du thalamus (-13% en moyenne) dépendent principalement de la sévérité de la lésion, confirmant un diaschisis[1], avec peu d'effet du sexe.
  • dans l'hémisphère contralésionnel, une différence liée au sexe est observée : les volumes de matière grise sont plus petits chez les patients masculins que chez les témoins masculins, principalement dans les territoires symétriques à la lésion, alors qu'il n'existe pas de déviation de la trajectoire typique de croissance chez les filles. Cette différence selon le sexe est également retrouvée dans les deux hémisphères cérébelleux (diminution de volume plus marquée chez les garçons).
  • L'absence de changement entre 7 et 16 ans semble indiquer que le défaut de croissance débute très précocement dès la période périnatale, et que la puberté a peu d'effet sur ces trajectoires.

L'ensemble de ces résultats est en faveur d'un effet du sexe sur les trajectoires de croissance du cerveau après une lésion précoce, confirmant la vulnérabilité spécifique du cerveau du bébé masculin autour de la naissance, ce qui est à rapprocher de l'importante sur-représentation des garçons dans une grande variété de troubles du neurodéveloppement.​

Contact Institut des s​​ciences du vivant Frédéric-Joliot :

Lu​​​cie Hertz-Pannier (lucie.hertz-pannier@cea.fr)


[1] diaschisis : phénomène d'hypofonctionnement d'une région cérébrale située à distance d'une lésion cérébrale mais anatomiquement reliée à cette dernière.

Haut de page