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Réseau quantique : des ions intriqués sur le campus d'Innsbruck


​Des chercheurs de l'Université d'Innsbruck (Autriche) sont parvenus pour la première fois à intriquer deux ions piégés, situés respectivement dans deux laboratoires distants de 230 mètres. Leurs résultats expérimentaux se sont révélés conformes à la modélisation réalisée par des théoriciens de l'IPhT, à partir d'une caractérisation poussée des équipements.  
Publié le 7 février 2023

Avec les bits quantiques supraconducteurs, les ions piégés par un champ électrique et refroidis par laser constituent des plateformes ayant permis d'obtenir de petits ordinateurs quantiques. Un enjeu de recherche consiste à démontrer que ces plateformes peuvent être intriquées en réseaux afin d'exécuter des algorithmes à grande échelle, en les distribuant sur des petits ordinateurs quantiques.

Jusqu'à présent, les ions piégés n'avaient été intriqués que dans un seul et même laboratoire. Avec l'intrication de deux ions piégés distants de plus de 200 mètres, les chercheurs autrichiens ouvrent la possibilité de réaliser les nœuds d'un réseau quantique s'étendant à l'échelle de villes, voire de continents.

Comment ont-ils procédé ?

À l'aide de deux fréquences laser accordées sur deux transitions énergétiques de l'ion calcium, ils portent simultanément les deux ions dans l'un ou l'autre des états excités par le laser. Les ions excités émettent alors chacun un photon. Les longueurs d'onde de ces photons sont identiques pour les deux transitions possibles ; seules diffèrent leurs polarisations – horizontale pour une transition et verticale pour l'autre. Ces phénomènes induisent l'intrication entre chacun des ions et le photon qu'il émet. Ces deux photons sont ensuite collectés indépendamment puis détectés en coïncidence, mais seulement dans la configuration où leurs polarisations sont croisées. Cette mesure déclenche alors l'intrication entre les deux ions.

Pourquoi l'intrication entre les ions est-elle possible à plus grande distance qu'auparavant ?

Cette avancée s'explique d'abord par une innovation technique : l'utilisation d'une cavité optique composée de deux miroirs en vis-à-vis, au lieu d'une simple lentille, permet désormais de collecter efficacement les photons émis par les ions.

Quelle est la contribution des chercheurs de l'IPhT ?

Ils ont développé un modèle de l'ion piégé et de sa capacité à émettre des photons uniques qui tient compte de toutes les sources de bruit de l'expérience réelle. Ils peuvent ainsi guider les expérimentateurs en prédisant par exemple les résultats qu'on peut espérer en augmentant la distance entre les ions ou en identifiant les sources de bruit les plus pénalisantes afin de faire progresser l'expérience. 

L'expérience d'Innsbruck, qui démontre l'intrication entre deux nœuds d'un réseau d'ions piégés, pourrait, à l'avenir, être étendue à un réseau quantique impliquant de nombreux nœuds. Celui-ci pourrait connecter plusieurs petits ordinateurs quantiques, qui fonctionneraient alors comme un grand, mais aussi relier des capteurs quantiques, pour détecter des phénomènes délocalisés, ou encore communiquer de façon sécurisée sur de grandes distances. 

L'Université d'Innsbruck et l'IPhT sont partenaires du projet Quantum Internet Alliance, coordonné par l'Université de Delft (Pays-Bas), dans le cadre du Quantum Flagship de l'Union européenne. L'objectif est de développer d'ici 7 ans la connexion entre deux réseaux quantiques métropolitains, comptant chacun une dizaine de liaisons analogues à celle décrite dans ces travaux et séparés par une distance voisine de 500 km.

Lire aussi l'article sur le site de Physics.

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