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Quand les crues redessinent les puits de carbone des fleuves


​Les deltas fluviaux reçoivent une grande quantité de sédiments transportés par les fleuves, en particulier pendant les crues, en agissant comme de véritables puits de carbone sur le long terme. Cependant, les processus de dépôts peuvent avoir des conséquences biogéochimiques encore mal connues. Une équipe du LSCE a étudié deux crues du Rhône survenues en 2008 pour mieux comprendre ces phénomènes.​​​

Publié le 10 novembre 2025

La composition des sédiments modifie les flux de carbone

Lors d​e phénomènes de crues, les fleuves déposent de grandes quantités de sédiments (vase, débris organiques, bactéries, minéraux, etc.) en très peu de temps dans les deltas. Ces apports modifient la composition des couches sédimentaires et leur biogéochimie.

Pour mieux comprendre ce phénomène et ses conséquences sur les émissions de carbones et de gaz, une équipe du LSCE (CEA-CNRS-UVSQ) a combiné un modèle numérique à des ensembles de données issues de deux crues du Rhône en 2008 : l'une au printemps (avec un dépôt de 30 cm de sédiments pauvre en matière organique) et l'autre à l'automne (riche en matière organique, 10 cm).

Les chercheurs ont observé des réactions très différentes, selon la nature des dépôts :

  • Lors de la crue de printemps, la production de carbone inorganique dissous (principalement du CO₂ issu de l'oxydation) s'est réduite, entraînant un rejet moindre de carbone vers l'eau de fond. 
  • À l'inverse, la crue automnale, riche en matière organique, a provoqué un rejet important de CO₂ vers l'eau de fond du delta​

La composition des sédiments déposés détermine donc la direction du flux de carbone : certaines crues favorisent le stockage du carbone, tandis que d'autres le libèrent dans l'eau.


Fig. 1 : Flux de carbone des sédiments vers l’eau. Après la crue de juin pauvre en carbone organique les flux diminuent, alors qu’ils augmentent fortement après la crue de novembre riche en carbone organique.​

Une mémoire chimique des crues

Les chercheurs ont également montré que les sédiments conservent une mémoire temporaire des crues passées. Certains gaz, comme le méthane, mettent du temps à retrouver leur niveau initial entre deux événements (séparés de seulement six mois dans le cas des crues de 2008). Les évènements successifs se cumulent donc dans le sédiment et peuvent mener à des modifications biogéochimiques.

Dans un contexte de changement climatique, les crues seront plus fréquentes et plus intenses. Cet effet mémoire des signatures biogéochimiques pourrait devenir plus important.

Un maillon du cycle global du carbone

Ces travaux rappellent que les deltas des fleuves ne sont pas de simples zones de dépôt et de puits de carbone, mais des acteurs biogéochimiques dynamiques. Les crues, en modifiant la composition et la quantité des sédiments, influencent directement les flux de carbone et de nutriments à l'interface terre-mer. Des processus à prendre en compte dans les modèles de système Terre utilisés pour les simulations climatiques.​​​

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