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La collaboration DESI précise la masse des neutrinos


Une collaboration internationale de chercheurs, avec une contribution significative de l'Irfu, resserre un peu plus l'estimation faite sur la masse des neutrinos. En s'appuyant sur les données de DESI et d'autres expériences, ils ont analysé la distribution de la matière à différentes époques de l'Univers pour déterminer l'influence qu'ont eu les neutrinos. Les résultats valident ce que révèlent les expérimentations en physique des particules ainsi que les dernières découvertes sur l'énergie noire.

Publié le 24 novembre 2025

​Les neutrinos sont des particules électriquement neutres très légères, dont les physiciens essayent de déterminer la masse. L'Univers contient une grande quantité de neutrinos dits cosmologiques, apparus au tout début de son histoire, il y a 14 milliards d'années. Leur vitesse initiale était proche de celle de la lumière, ce qui en faisait des particules dites « relativistes » (dont la vitesse n'est pas négligeable par rapport à celle de la lumière). Ils avaient alors un comportement similaire à celui de photons, à savoir des particules qui traversent l'univers sans tomber dans les zones denses qu'ils rencontrent.

Au fur et à mesure de l'expansion de l'univers, leur vitesse a diminué jusqu'à ce qu'ils deviennent des particules non-relativistes. Dès lors, leur comportement est devenu plus comparable à de la matière : leur vitesse n'étant plus suffisante pour compenser leur masse, ils cèdent à l'attraction gravitationnelle et restent piégés dans les zones denses de l'Univers.

Ce passage d'un état relativiste à un état non-relativiste des neutrinos intéresse particulièrement les astrophysiciens car il permet d'estimer leur masse, en observant la taille de l'Univers et la distribution de sa matière — sous forme de galaxies — au cours du temps. Une masse élevée signifierait que les neutrinos sont rapidement arrivés à un état non-relativiste dans l'histoire de l'Univers. Dans cet état, leur masse et la gravité les entraînent vers les zones denses en matière, qu'ils participent à leur tour à densifier. A l'inverse, une masse plus faible signifierait qu'ils restent plus longtemps dans un état relativiste, avec une vitesse qui leur permet d'échapper aux effondrements gravitationnels à l'origine des galaxies, des amas de galaxies et des filaments d'hydrogène qui peuplent l'Univers. Sans la participation précoce des neutrinos à ces structures, leur formation est ralentie.

Figures ci-dessus : deux modélisations des filaments de matière qui se forment dans l'Univers et qui diffèrent ici selon la masse des neutrinos. Ce sont ces filaments de matière qui vont donner naissance aux premières galaxies.
À gauche : cas extrême qui suppose que la masse des neutrinos est nulle. Les filaments sont peu définis et les espaces entre eux contiennent beaucoup de matière.
À droite : cas où les neutrinos ont une masse élevée. La matière s'est effondrée plus vite sur elle-même, formant des filaments bien définis avec peu de matière dispersée entre eux


Cartographier l'Univers avant et après le changement d'état des neutrinos

Une équipe internationale de chercheurs impliquant l'Irfu a ainsi cartographié l'Univers à des époques différentes de ses 14 milliards d'années d'existence, en s'appuyant sur les données de plusieurs expériences :

  • Le relevé DESI a fourni des données sur la position de millions de quasars et galaxies, dont la lumière a été émise entre 2,8 et 13 milliards d'années après le Big Bang.
  • Le satellite Planck et l'Atacama Cosmology Telescope ont fourni des données sur le fond diffus de l'Univers, environ 400 000 ans après le Big Bang

Les physiciens ont ainsi obtenu deux photos de l'Univers à des époques plus ou moins lointaines, entre lesquelles les neutrinos ont connu leur changement d'état. En comparant l'évolution entre ces époques au modèle standard du fonctionnement de l'Univers, les chercheurs ont déterminé une valeur très faible pour la masse des neutrinos (Σmν < 0,053 eV à 95% de degré de confiance, environ 10 millions de fois moins qu'un électron). Cette limite est si faible qu'elle franchit un seuil minimal issu de la physique des particules, Σmν > 0,059 eV.

Une deuxième estimation, fondée sur un modèle d'évolution de l'Univers plus relâché dans lequel l'énergie noire évolue au cours du temps, mène à un résultat moins contraignant (Σmν < 0,177 eV),  mais plus cohérent avec la physique des particules.

Des modèles de plus en plus complexes et de nouvelles données à venir

Ces résultats sont en accord avec les expériences de physique des particules et confirment une valeur positive pour la masse des neutrinos dans ce modèle cosmologique alternatif dans lequel l'énergie noire évolue au cours du temps. Des valeurs encore plus précises sont attendues dans les années à venir grâce à de nouvelles campagnes d'observations sur des galaxies et quasars encore plus lointains (jusqu'à 1,8 milliards d'années après le Big Bang), ainsi qu'à des modèles plus précis qui incorporent les dernières découvertes sur l'énergie noire.


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