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Résultat scientifique | Biologie structurale | Antibiotique

Ces bactéries qui discutent


Des chercheurs de l’IBS ont montré comment les bactéries conversent au sein des biofilms flottants. Les protéines impliquées dans cette interaction pourraient être de nouvelles cibles dans la lutte contre la résistance aux antibiotiques et les infections nosocomiales.

Publié le 8 mars 2018
Certaines bactéries ont la capacité de s’agglomérer pour se protéger de l’extérieur en formant des colonies appelées biofilms. La formation de ces biofilms peut être à l’origine de certaines infections nosocomiales dans les hôpitaux, par exemple lorsqu’ils se retrouvent sur des instruments (sondes, implants, etc.) ou d’une résistance aux antibiotiques en favorisant l’apparition de mutants plus virulents. Les biofilms se caractérisent par la présence d’une matrice extracellulaire composée de polysaccharides, d’ADN et de fibres amyloïdes. Cette matrice rend les biofilms résistants aux traitements antibiotiques et permet la communication des bactéries par voie chimique, communication appelée quorum sensing.

Mais comment le quorum sensing fonctionne-t-il dans les toutes premières étapes de la formation du biofilm, c’est à dire quand la densité bactérienne est faible et qu’aucune matrice n’est encore présente ?  En combinant plusieurs approches de la biologie structurale, les chercheurs de l’IBS, en collaboration avec l’université de la Méditerranée à Marseille et l’université Jacobs de Brême, ont découvert que Providencia stuartii, une bactérie fréquemment isolée chez les grands brulés et les personnes sous cathéterisation longue (maisons de retraite, hôpitaux), établit une communication intercellulaire directe dès le stade de plancton – c’est à dire, avant la sécrétion d’une matrice extracellulaire. Ils ont observé que P. stuartii forme des communautés cellulaires flottantes au sein desquelles les cellules sont en contact direct, avant de sédimenter sous la forme de biofilms. Faisant l’hypothèse que ce contact implique forcément des protéines de la membrane externe, et que celles-ci doivent nécessairement y abonder pour permettre le rivetage serré observé au sein des communautés flottantes, ils ont cristallisé deux protéines de P. stuartii, appelées porines, correspondant à 70% du contenu protéique de la membrane externe, et résolu leurs structures à résolution atomique par cristallographie aux rayons X.

Il s’avère que les porines s’assemblent sous forme de trimères, des « trios » de porines. Au sein  de ces trios, les canaux des porines sont ouverts et se font face, suggérant qu’ils permettent une communication chimique directe entre cellules adjacentes, au sein des communautés flottantes. Ce mécanisme serait adapté à la communication intercellulaire même à très basse densité cellulaire, et donc, dans les premiers stages de la formation du biofilm – c’est à dire, quand il est encore vulnérable aux attaques. Cette découverte désigne les porines comme de nouvelles cibles dans la lutte contre biofilms et pourrait permettre le développement de thérapies innovantes.



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