Les lanthanides sont des éléments chimiques de la famille des terres rares qui ont de formidables propriétés de luminescence. Pour cette raison, ils sont des composants indispensables pour de nombreuses technologies actuelles (lasers, dispositifs d'éclairages, écrans, encres anti-contrefaçon pour les billets de banque, etc.).
Entre autres, ils pourraient être très intéressants pour des applications en imagerie biologique ou médicale par microscopie, car leurs propriétés de luminescence sont très particulières en comparaison de celles des molécules organiques fluorescentes. Et c'est justement vers cet objectif qu'un nouveau pas a été franchi par des chercheurs du CEA-Irig.
Des caractéristiques luminescentes intéressantes mais difficilement exploitables
L'émission des lanthanides se distingue de celles des molécules organiques fluorescentes par des raies d'émission très fines et très longues (de l'ordre de la microseconde à la milliseconde, au lieu de la nanoseconde pour la luminescence naturelle provenant des cellules ou des fluides biologiques). Elles présentent aussi l'avantage de se faire à des longueurs d'onde fixes, caractéristiques de chaque lanthanide.
Tous ces paramètres permettent de les discriminer aisément de la luminescence endogène biologique lors des expériences de microscopie, ce qui est d'un intérêt majeur.
Cependant, les lanthanides sous forme de cations sont toxiques et doivent être encapsulés dans une molécule pour être utilisés dans le vivant : on parle alors de « complexe métallique » ou « complexe de lanthanide ». Le problème est l'absence de contrôle de leur pénétration dans les cellules et de leur répartition en leur sein : la plupart des complexes de lanthanides décrits dans la littérature scientifique et capables de pénétrer dans les cellules se retrouvent dans les lysosomes (les poubelles des cellules).
Contrôler l'introduction dans les cellules grâce à des peptides
Pour y remédier, les chercheurs du Laboratoire de Chimie et Biologie des métaux ont mis au point une méthode qui utilise des peptides : « Nous avons greffé des complexes de lanthanides sur des peptides capables de rentrer dans les cellules, d'atteindre le cytosol et de se répartir uniformément à l'intérieur, nous expliquent Daouda Ndiaye et Kyangwi Patrick Malikidogo, deux des auteurs de l'étude, Les images de microscopie que nous avons obtenues nous ont alors montré une répartition du lanthanide dans toute la cellule, indiquant que la sonde avaient atteint son objectif plutôt que de finir dans les lysosomes. »
Cette étude est un premier pas vers la création et l'utilisation de sondes intelligentes à base de lanthanides. Ces dernières pourraient permettre à l'avenir de détecter et localiser des molécules d'intérêt dans les cellules et de mieux comprendre leur métabolisme.
Ces travaux ont été menés en collaboration avec l'ENS Lyon et l'Institut pour l'Avancée des Biosciences de Grenoble. Ils ont abouti à la parution d'un article dans la revue Chemical Science.