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L’évolution suit le climat : les chênes se sont rapidement adaptés aux variations climatiques de l’Anthropocène


​Avec l’accélération du réchauffement climatique due aux activités humaines, la question de la vitesse d’évolution et d’adaptation des arbres est au cœur des préoccupations actuelles des chercheurs et forestiers. Les chercheurs d’INRAE, de l’ONF, du CEA ainsi que des universités d’Uppsala (Suède) et de Zhejiang (Chine) ont étudié l’évolution des chênes de trois forêts françaises au cours des trois derniers siècles, de la période froide du Petit âge glaciaire au réchauffement dû aux activités humaines. Leurs résultats, publiés le 5 janvier dans Evolution letters, montrent que les chênes évoluent rapidement et sont capables de s’adapter aux variations climatiques en quelques générations. D’après ces conclusions, les gestionnaires forestiers auraient ainsi intérêt à raccourcir les générations et à favoriser la régénération naturelle des forêts pour faciliter l’évolution rapide des peuplements

Publié le 7 janvier 2022

​Les chercheurs ont réalisé une analyse rétrospective de l’évolution des chênes entre 1680 et aujourd’hui, une échelle de temps qui a vu se succéder la période froide du Petit âge glaciaire (1450-1850) et la période chaude de l’Anthropocène, depuis 1850 jusqu’à l’époque actuelle. Ces travaux avaient pour objectif de comprendre comment les populations de ces arbres ont réagi aux différentes variations climatiques. Concrètement, ils ont séquencé et analysé le génome entier de 600 chênes de trois forêts françaises (Tronçais dans l’Allier, Réno Valdieu dans le Perche et Bercé dans la Sarthe) répartis en quatre cohortes selon leur âge : la première avec une moyenne d’âge de 340 ans, la seconde de 170 ans, la troisième de 60 ans et la dernière de 12 ans. Les scientifiques ont étudié les variations dans les fréquences des allèles[1]  observables dans le génome des quatre cohortes. Ils ont mis en relation ces variations avec l’évolution du climat, notamment la fréquence d’événements extrêmes comme des hivers rigoureux ou des sécheresses extrêmes.

Une évolution rapide des chênes adaptée à chaque période climatique

Les résultats montrent qu’il y a une évolution des peuplements selon un schéma évolutif identique dans les trois forêts et différent selon les périodes climatiques explorées. Les variations observées dans le génome des arbres les plus anciens ayant poussé durant la période froide du petit âge glaciaire sont à l’opposé de celles observées sur les jeunes arbres poussant durant la période chaude de l’Anthropocène. Ces signatures évolutives dans les génomes signifient que les chênes peuvent évoluer rapidement, avec des sauts évolutifs observables sur peu de générations, et qu’ils sont capables de réorienter leurs trajectoires évolutives en un temps relativement court et de s’adapter rapidement à des changements de climat.

Adapter la gestion forestière pour favoriser l’évolution des chênes

Ces résultats apportent de nouvelles connaissances pour adapter la gestion des forêts au changement climatique. Ils posent la question du maintien d’arbres plus que centenaires, adaptés à un climat froid, qui peuvent ralentir le processus évolutif en fécondant de plus jeunes arbres. Le raccourcissement des générations permettrait ainsi d’accélérer l’évolution et de limiter les effets de maladaptation due à la pollinisation par les vieux peuplements. Les forestiers peuvent adapter leur gestion forestière de la régénération naturelle pour laisser plus de place à l’évolution.En régénération naturelle, l’ensemencement se fait sans intervention humaine avec des semis très denses de plus de 100 000 graines par hectare. Les arbres sont ainsi confrontés à une forte pression de sélection où 95% des individus seront éliminés au cours des 15-20 années suivantes, et où les arbres les mieux adaptés aux conditions climatiques courantes seront sélectionnés.

[1] Les allèles sont les différentes versions possibles d’un même gène susceptibles d’expliquer des différences entre arbres pour un même caractère. La fréquence des allèles d’un même gène peut varier selon des critères de sélection environnementale comme la sécheresse ou le froid.

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